[CINEMA] Millenium : la désinvolture insultante de Fincher

David Fincher m’a mise très en colère. Son adaptation de Millenium est à la fois indigeste, indécente tellement elle est aux antipodes du livre et de son personnage principal (Lisbeth Salander) et complètement survolée – j’en suis venue à me demander s’il avait lu autre chose que le scénario qu’on lui a mis entre les mains tellement l’esprit n’y est pas. Mais commençons d’abord par les qualités de ce film (il y en a quelques-unes).

– Le générique du début est un chef d’oeuvre. J’ai rarement vu un objet graphique aussi beau. Un mélange des meilleurs génériques de James Bond, de l’esprit de celui du Millenium suédois, et de fluides. Un bijou.

– Le chat. Il est parfait. Mignon comme tout, poilu, grands yeux verts, oreilles pointues, miauleur, hautain, carpette, radiateur. Un vrai chat, quoi.

– La photographie. Rien à dire. Impeccable.

– La scène dans le métro. Sans rien dévoiler de l’intrigue, la scène où Lisbeth se fait voler son sac dans le métro est une merveille du genre. Avec une chorégraphie très fluide (mais qui enlève toute sensation de réalité à l’ensemble), elle se termine pas un plan séquence calculé à la milliseconde et au millimètre près. Une merveille.

– La bande-son et la BO, au plus proche de l’univers du roman.

Voilà pour ce qui va. Tout le reste est soit passable, soit bancal, soit franchement mauvais.

[Attention spoiler : exemples précis à suivre.]

– Le scénario a pris beaucoup de libertés par rapport au livre – et c’est le genre de chose que je pardonne difficilement. Une rencontre entre Mikael et Lisbeth réécrite, des personnages disparus ou transformés, des enjeux changés, des actions importantes atténuées, une fin modifiée à la fois pour le méchant et pour la gentille… Bout à bout, on arrive à une histoire qui peine à retrouver l’esprit d’origine. C’est un peu dommage. Un des personnages principaux étant l’atmosphère si particulière qui a fait le succès des livres, c’est un outrage au regretté Stieg Larsson.

– L’américanisation du tout. C’est usant. Et bien américain, ça. Ils peuvent pas être un peu humbles et nous foutre la paix avec leurs fichus codes culturels qui n’ont rien à faire dans une adaptation d’un livre suédois ?? Je suis la première à apprécier l’humour qui tache des grosses productions hollywoodiennes, mais il y a des films où il faut se savoir se tenir, nom de nom. Les blagounettes potaches en clin d’oeil à leurs films d’action n’ont rien à faire dans Millenium où elles deviennent irrespectueuses du propos, indécentes pour le spectateur et insultantes pour l’auteur et les millions de personnes qui ont aimé le livre.

(Ouais, je suis un peu énervée, le scénariste Steven Zaillian est désormais classé comme « gros Américain de base hautain, imbu de lui-même, méprisant, imbuvable, persuadé que le monde tourne autour du nombril des USA qui est la seule culture qui existe – ah bon comment ça y en a d’autres ? c’est pas possible voyons.)

Lisbeth Salander. La pauvre. Elle n’est déjà pas un personnage facile, mais elle n’est vraiment pas aidée par son interprète, Rooney Mara, qui est à peu près aussi crédible que Glenn Close en Justin Bieber (j’exagère certes un peu, mais franchement, c’est pas réussi). Et ce n’est pas de sa faute, d’ailleurs !

Choisie par facilité et feignasserie (elle était au casting de The Social Network, le précédent film de Fincher), elle était mal dirigée par un réalisateur pas emballé par l’histoire et par un scénariste/dialoguiste qui a fait n’importe quoi. Cerise sur le gâteau (et sacrilège), elle a dû composer son personnage en s’accommodant de costumes destinés à devenir… une collection H&M. On rêve, bordel !!

On parle de Lisbeth Salander, une hacker brillante, asociale, handicapée sentimentale, avec un passé affreux et un présent pire encore, terriblement attachante, pupille de l’Etat, considéré comme violente, débile et dangereuse par toutes les autorités de son pays… pas d’une Victoria Beckham gentiment trashisée, merde !!!

Mais alors pire que tout : elle est partout à poil sur les photos de promo. Euh… comment dire. D’ailleurs en fait je vais me taire parce que je vais être très vulgaire.

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Et que je te la filme sexy en petite culotte, et que je lui mets du blush sur les joues dans les scènes de lit, et que je te la fais acheter un cadeau pour Mikael… MAIS WHAT THE FUCK ??? Lisbeth n’est pas sexy : elle est sèche, musclée, sans formes, on la confond avec un jeune garçon. Elle ne met pas de rose sur les joues – mais il s’est cru où, Fincher, sans déconner ?? La seule couleur que Lisbeth connaît, c’est le noir. Et elle est incapable d’un quelconque geste de générosité : elle ne dit pas bonjour s’il te plaît merci au revoir, elle ne regarde jamais dans les yeux à moins de défier,  elle sourit quand elle se pince, c’est un coffre-fort à triple blindage, et elle n’offre pas de cadeau – mais d’où ils sortent ??

Et bien entendu, comme la jeune comédienne était mal dirigée avec des répliques débiles (« Je suis folle »… non mais on rêve putain, JAMAIS elle ne dit ça, c’est être complètement à côté de la plaque dans la compréhension du personnage), il n’y a pas une seule ligne de texte qu’elle dise de manière juste (et une fois n’est pas coutume, je l’ai vu en VO, hein). Et elle est nominée aux Oscars… Je vais me pendre avec une bobine et je reviens.

Si vous voulez voir une performance vraiment impressionnante, voyez Noomi Rapace dans la série suédoise en 6 fois 90 minutes. Voilà, ça c’est du putain de bon boulot. Et c’est elle qui mériterait un Oscar.

– Le réalisateur, David Fincher pour ne pas le nommer. Bon, je l’ai déjà un peu rhabillé pour l’hiver. Mais y a erreur de casting, hein. Je suis très admirative de son travail en général et The Game fait partie de mon Top 3 des meilleurs films de l’histoire. Mais là c’est juste pas possible. Il faut qu’il arrête de réaliser des films qu’il n’a pas envie de faire.

« Tu plaisantes ? Une lesbienne asociale, un viol, une condamnation de la misogynie ? », aurait-il dit à sa productrice quand elle lui a proposé le projet.

No comment.

« Les hommes qui n’aimaient pas les femmes », sous-titre du roman. Eh mec, c’était pas censé correspondre au réalisateur, hein. Nan parce que si c’était le but, bravo, CLAP CLAP CLAP, c’est réussi, impec, brillant ! Les rôles féminins réduits à des portions congrues ou ridicules (Robin Wright inexistante avec un accent WTF, un personnage important supprimé par rapport au bouquin, les scènes de cul dont le viol qui ressemblent plus à un mauvais porno qu’à un thriller glaçant où t’as envie d’étriper le mec et où t’as mal pour elle, un violeur volontairement victimisé…)

Non seulement David Fincher n’a pas saisi l’esprit du livre – si tant est qu’il l’ait lu – mais en plus sa misogynie transpire. Pour une adaptation d’une histoire dont le personnage principal n’a pour but dans la vie que de faire la guerre aux hommes qui n’aiment pas les femmes, ça se pose là.

Je m’arrête là. Je suis en colère. Stieg Larsson doit se retourner dans sa tombe. Ce film donne la migraine et pour les mauvaises raisons. Si vous voulez voir une bonne adaptation, je vous conseille vivement la série suédoise sortie en DVD. Brillantissime. Mais pas cette honte.

16 réflexions sur « [CINEMA] Millenium : la désinvolture insultante de Fincher »

  1. Moi j’adore l’actrice Noomi Rapace!
    (j’espère que ce commentaire audacieux ne heurtera pas la sensibilité des lecteurs de ce blog. J’ai hésité pour le point d’exclamation, c’est peut être un peu agressif mais tant pis si cela ne passe pas (comme le précédent).

  2. Moi j’ai pas lu les livres (ma mère si et elle a aimé) et pas vu la série en 6 épisodes de 90mn mais le film (en 2 épisodes ) qu’est passé sur M6 il y a pas longtemps et j’avoue que j’ai été bluffé par Noomi Rapace interprétant le personnage de Lisbeth Salander (magistralement). . Je pense que toute les autres actrices que je verrais dans ce rôle passeront à mes yeux pour des Jeanne Mas effarouchées.

    @lebranleur quel formidable commentaire de désinformation. vous maniez la mauvaise foi avec tant de talent que j’ai presque envie d’aller voir le film pour savoir à quel point j’ai été entourloupé, bravo ! 🙂
    Je vous conseille vivement de voir la série ou le film Suédois et de nous dire ce que vous pensez de l’interprétation de Noomi Rapace (pour voir si j’ai vraiment un à priori sur ce film américain en ayant vu que quelques extraits avec cette actrice qui m’a paru si fade (mais je place peut être Noomi Rapace sur un piedestal)
    En attendant encore merci pour cette contre critique subtile même si je me range totalement du côté de Florence (oui j’ai pas lu le livre et vu que le film Suédois pas la série, mais j’avais déjà une mauvaise intuition sur ce film américain et Florence l’a confirmé (pis en plus j’aime pas Craig, je suis jaloux, qu’est ce qu’il a de plus que moi , hein?! hein?! ))

    • En fait, le film suédois que tu as vu… est la série 😉 Ils ont fait 2x90mn par livre, ce qui fait une série de 6 films pour couvrir la trilogie. Et en effet, faire oublier Noomi Rapace dans son rôle me paraît ambitieux.

      • Cher Le branleur, je suis peut être un peu excessif, et de mauvaise foi moi-même puisque je n’ai pas vu le film américain (ni aucun James Bond avec Craig qui ne m’inspire pas comme acteur), ni lu la trilogie. Mais si vous regardiez la série ou le film Suédois vous pourriez mieux en juger et ainsi nous faire part de votre opinion. Si après cela votre critique est toujours en faveur des américains je vous promets de regarder ce film dès qu’il passera à la TV (ce qui pour moi serait une punition ).

  3. Je ne suis pas d’accord du tout avec cet article… je ne supporte pas les films ricains, ni les adaptations de livres… mais, là, je voulais essayer… pour voir ce que ça donnerait!
    Hé bien… j’ai rarement vu une interprétation aussi respectueuse de l’ambiance du livre…
    Mais, faut-il rappeler qu’il n’y a rien de plus subjectif que le ressenti lors de la lecture d’un livre?
    Je pense qu’on a tous( lecteurs de MILLENIUM), créé notre propre univers imaginaire durant les pages du bouquin…
    Donc, aux lecteurs de MILLENIUM qui hésitent à aller voir ce film : tentez le coup, ce n’est pas un navet, et (peut être ) que vous trouverez ce film aussi respectueux de l’ambiance du livre que moi… qui sait?
    … personne ne peut vous dire à l’avance ce que vous allez en penser!!!

    • Bien entendu que personne ne peut dire à l’avance ce que quelqu’un pensera d’un film ! Ce billet conseille juste de voir l’adaptation suédoise plutôt que l’adaptation américaine.
      Mais on m’a demandé sur Facebook si je conseillais d’aller voir celui-là quand même. Ce à quoi j’ai répondu que malgré le fait que je n’ai pas aimé cette adaptation que je trouve ratée, j’étais quand même contente de l’avoir vue pour me faire une opinion et comparer. A chacun de choisir de se rendre dans une salle de cinéma… ou pas ! Mais je n’ai pas la prétention – et ne l’aurai jamais – d’obliger ou d’empêcher une personne d’aller voir un film… 😉

  4. Continuons donc de nous étriper dans la bonne humeur,

    J’ai personnellement la fâcheuse tendance de ne pouvoir apprécier un film adapté d’un roman s’il n’est pas adapté parfaitement, je me souviens toujours des petits détails inhérents au roman et souvent gâchés par le film qui m’empêchent d’apprécier des films que j’aurais pu aimer autrement. Je suis complètement psychorigide des adaptations.

    Or pour Millenium, j’ai trouvé tout ce qui m’avait fait plaisir dans le roman. Au point de me demander si j’avais vu un très bon polar ou une simple adaptation ligne par ligne du roman original. Je précise quand même que je n’ai pas vu les versions suédoises et que donc j’ai pu ne pas être influencé par ces précédentes versions dans ma vision de fincher.

    – le générique : quelle horreur mon dieu, moi qui craignais que Craig soit trop Bond pour le rôle de Blomvkist (trop carré, trop armoire à glace), je me retrouve devant une espèce de générique ridicule typiquement à la James Bond (gonzesse à poil stylisée par quantité d’effets grotesques et musique totalement insupportable). Un générique parfait pour un film qui va dépoter avec moult scènes d’actions mais un générique n’ayant rien à voir avec l’ambiance lourde du livre, propice à une investigation poussée dans une famille de monstres. Donc déjà le générique extrêmement mal calibré laissait présager du pire.

    – L’américanisation du tout : je dois avouer que je ne comprends pas ce à quoi tu peux faire référence, je me souviens que tous les médias dans le film sont systématiquement en suédois, magazines comme journaux télévisés. Et je me souviens m’être dit que cela aidait à renforcer l’immersion. Je ne vois pas à quels « codes culturels » tu peux faire référence. et quand bien même un clin d’oeil à James Bond m’aurait échappé, j’aurais vu ça comme un clin d’oeil et non comme un crachat. Se pourrait-il que tu aies fait feu de tout bois pour t’acharner sur un film t’ayant véritablement irrité ?

    – Lisbeth Salander : c’était aussi ma plus grande crainte tant ce personnage est casse-gueule, true. Alors d’abord je ne pense pas qu’un lead dans un film de fincher, adapté d’un roman à grand succès soit choisi par facilité (surtout que la pauvresse avait trois lignes dans « the social network »). Je ne suis pas au courant des aléas du casting mais je doute franchement qu’elle ait été prise par piston.

    Tu fais référence aux dialogues mais ce sont les mêmes que dans le bouquin, surtout que le personnage n’étant pas très expansif par nature, ses dialogues se bornaient dans le livre au strict nécessaire (« oui », »non », »très bien »). Je dirais d’ailleurs que le dialoguiste a eu un travail plutôt easy avec un tel personnage.
    Pour son style, je me souviens que dans le bouquin, elle s’habille n’importe comment avec des affinités punkette, ce que j’ai vu dans le film. Peu m’importe qu’une ligne de vêtements cheap en fasse son beurre après, cela n’a rien à voir avec ses costumes qui sont clairement adaptés du livre (ne serait-ce que le tshirt « fuck you fucking fuck »); ta remarque me semble hors sujet par rapport à l’adaptation du livre.

    Lisbeth m’a bien paru asociale (montré par l’entrevue avec Dirch au début du film), brillante (montré par l’exercice de sa mémoire eidétique durant la rencontre avec Blomvkist et maintes fois relayé par les propos de moult protagonistes et par l’intrigue elle-même, on ne la sent débile à aucun moment, on la sent justement très intelligente). On voit bien que c’est une hackeuse (on la voit bien espionner l’ordi de Vennerstrom de chez elle, on la voit hacker l’ordi de Blomvkist et on la voit taper des lignes de code à la vitesse de la lumière, pas de souci à ce niveau-là).
    Le personnage est dans sa conception totalement fidèle à son modèle. Notamment physiquement, elle doit peser 40 kg, j’ai trouvé qu’elle avait peut-être un peu trop de seins mais je l’ai trouvé tout à fait conforme à l’idée que je m’en faisais.
    J’imagine que tu as du adorer Rapace et que voir son rôle repris par une prod ricaine a du t’agacer, de même que les costumes repris par HM, je ne vois pas d’autres explications pour une telle animosité.

    Il fallait nécessairement couper dans le roman pour le faire tenir en script, et on a coupé des intrigues annexes sans grand autre intérêt que de donner encore plus de consistance aux personnages. a mon grand soulagement, ces relations sont implicites dans le film et les personnages n’en souffrent que très peu. On perd notamment la relation Armansky-lisbeth (pas grave), on perd la relation Blomvkist-éditrice (on s’en fout aussi). Je te trouve gonflée de confondre des coupes nécessaires au film à des intentions mysogines.
    De plus j’avais très peur pour les scènes de viol, de les rater ou les sentir fausses. J’ai trouvé les scènes de viol glaçantes : le plan de la chambre où le psy se déshabille lentement en gardant son peignoir avec son gros bide qui dépasse pendant que lisbeth se débat, enchainée, à poil, en hurlant dans son baillon est TRES réussie. Que cette scène avec sa musique claustrophobe ne t’ai pas fait ressentir de l’angoisse me laisse véritablement circonspect.

    J’avoue qu’apprendre que des remakes américains des films suédois (apparemment très bons) m’avait aussi copieusement agacé. Cela est tout à fait révélateur d’un posture méprisante « attendez les mecs vous vous êtes amusés mais nous on reprend la main, on va faire de vrais bons films avec ce bouquin »-style.
    Mais c’est aller trop loin que d’y voir du mépris, il s’agit simplement d’argent, ces projets sont trop rentables pour ne pas s’y essayer, tout simplement.

    tu finis par « Si vous voulez voir une bonne adaptation, je vous conseille vivement la série suédoise sortie en DVD. Brillantissime. Mais pas cette honte. ». Je pense que cela a été le vrai problème dans ta vision.
    J’ai pour ma part ai été très satisfait (le seul changement réel du film est qu’Harriet se trouve à Londres et non en Australie). Il me reste à voir les films suédois mais j’ai trouvé que le fincher avait une esthétique très pesante, des musiques lancinantes et totalement claustro, des flash-backs avec des couleurs saturées à l’extrême, bref ce que j’avais imaginé du film.

    Bref, à voir.

      1. – Tu fais souvent référence à James Bond – j’imagine que c’est parce que Daniel Craig tient le rôle principal de Millenium ? Mais je n’ai pas pu être influencée par James Bond parce que je n’ai justement pas vu ceux avec ce comédien… Donc aucune référence de ce type dans ma critique.

        – Concernant l’américanisation, je parle plutôt de passages du livre complètement réécrits soit pour les rendre plus « hollywoodiens », plus « grand spectacle » ou soit plus commodes pour une adaptation cinématographique. Un exemple : dans le livre, Lisbeth s’introduit chez son tuteur pour surveiller qu’il se tienne bien à ce qu’elle lui avait demandé. Elle farfouille dans ses dossiers et dans son ordinateur. Ensuite, elle va le réveiller dans sa chambre pour le menacer et lui rappeler qu’elle le tient à l’oeil. Alors que dans le film, c’est transformé en une confrontation de 20 secondes dans un ascenseur avec un violeur qui se met à grimacer et pleurer comme un enfant. Non seulement ça ne rend pas compte du tout de l’esprit du livre où Lisbeth s’introduit chez lui au milieu de la nuit, sorte de métaphore inverse des viols qu’elle a subis avant, mais en plus ça rend ridicule et anecdotique une situation et un personnage qui sont quand même au centre des trois livres. Je persiste et signe : David Fincher (ou son scénariste) ont fait beaucoup de mauvais choix de ce genre.

        – Lisbeth : c’est vrai – et tu as raison sur ce point – que j’ai été tellement bluffée, époustouflée par la performance artistique et physique de Noomi Rapace dans la version suédoise que celle de Rooney Mara m’a parue réellement travaillée par-dessus la jambe (et en fait, après m’être renseignée, ce film étant une commande devant être livrée dans des délais serrés, elle a bien été « choisie » par facilité puisqu’elle avait travaillé avec Fincher juste avant – mais c’est vrai que je ne peux pas vérifier ce que j’avance auprès des personnes citées… Avoue cependant que la coïncidence est troublante.)
        Quant à la scène du viol, non seulement elle ne m’a pas parue glaçante, mais en plus j’ai ressenti une sorte de perversion de la part du réalisateur qui semblait prendre un malin plaisir à filmer ce genre de truc. Un sous-porno. J’étais accompagnée d’un ami lors de la projection qui a eu exactement le même sentiment : il n’a pas été gêné par la nature de la scène mais par la manière dont elle était rendue et qui n’était pas claire. En bref : le choix de Fincher de faire interpréter le personnage du tuteur par ce comédien et en prenant la direction d’un pauvre être humain faible et non d’un pervers est, encore une fois à mon humble avis, un très mauvais choix qui dénature le roman et qui donne à la relation entre ces personnages une mauvaise tournure où Lisbeth serait vraiment vilaine de lui faire du mal et lui un pauvre homme à plaindre parce que dépassé par ses pulsions. (Alors que… COMMENT DIRE…)

        Pour finir, je te conseille sincèrement de voir les 6 films suédois et de me dire que tu en auras pensé. Je ne regrette pas d’avoir vu celui-là justement pour pouvoir comparer et pour voir ce qu’on peut faire au cinéma d’un roman comme celui-ci. J’ai juste trouvé que cette version, malgré ses qualités parce qu’elle en a (j’ai d’ailleurs commencé par ça) tire plus du côté de la série B améliorée que du chef d’oeuvre.

        David Fincher avait dit, après Alien 3, qu’il n’accepterait plus jamais de commande. Je pense sincèrement qu’il aurait dû s’y tenir.

    • haaaa je comprends enfin cette fameuse américanisation, au temps pour moi. Ceci dit, sans verser dans la mauvaise foi outrancière, cela dépend finalement de ton ressenti : cette scène étant dans le roman, elle ne m’a pas gêné et je n’ai pas pensé à son pendant suédois (qui est d’ailleurs plus clever dans la symbolique que tu dénotes, tout à fait).

      Pour Lisbeth, tu as argumenté ton point de vue sur la question, ce dont je te remercie. Nous avons eu deux ressentis assez différents de plusieurs éléments, essayer de se convaincre mutuellement ne pourra mener qu’à une lutte dont un seul de nous deux ressortira avant. Autant se mettre d’accord sur le fait que nous ne sommes pas d’accord (mais pour d’excellentes raisons tous les deux, faut pas déconner non plus)

      Enfin il est acquis que je dois de toute façon voir les films suédois, je suis assez intrigué par cette fameuse Rapace dont tout le monde vante la performance(et qui en est désormais réduite à jouer la potiche avec jude law et robert downey jr, super promotion miss).

      Je crains néanmoins de souffrir du même réflexe que toi durant ma vision, celui d’avoir en tête l’ambiance lourde et pesante ainsi que les tics de réalisation propres à Fincher ayant caractérisé le film dans mon esprit. J’espère que le film suédois sera aussi « beau » dans sa forme que son homologue américain (ce dont je doute un peu hélas).

      Bref, ce fut intéressant.

  5. J’avais peur que cette reprise ne soit « que » trop américanisée. Malheureusement c’est pire apparemment. Je n’irais donc pas voir ce film. La première version étant tellement dans l’esprit du livre que je m’en tiendrais là.
    Merci pour la critique.

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