[HUMEUR] STOP à la conquête, oui à l’exploration !

33 !! Non, il ne s’agit pas d’une visite chez un médecin d’un autre temps, ni du nombre d’années-lumière séparant une exoplanète récemment découverte de notre bonne vieille Terre, et encore moins du nombre de personnes présentes dans l’espace actuellement. Non non non. 33… Le mot « conquête » apparaît 33 fois dans le dernier hors-série de « Science&Vie » intitulé « Aller sur Mars – Où ? Quand ? Comment ? Pourquoi ? » Autant vous dire que la lecture de ces 150 pages a été un peu compliquée pour moi.

Petit rappel… Il y a un an, déjà, dans l’un des tout premiers épisodes de mon podcast « La folle histoire de l’Univers », je m’étais fâchée très fort contre un journaliste qui utilisait le mot « colonisation » (à partir de 7’20).

Voilà. La « colonisation » d’autres mondes, la « chasse » ou la « traque » d’exoplanètes ou d’astéroïdes, les exemples ne manquent pas. Et le vocabulaire faisant partie du champ lexical de la guerre, de l’agressivité et de la violence me hérisse un peu le poil, voyez-vous, surtout quand ça concerne l’espace. Et donc, 33 « conquêtes » dans ce hors-série, alors qu’on n’utilise plus ce mot depuis les années 70 et qu’on parle désormais d’exploration, comment vous dire… En lisant ce magazine, j’ai eu un peu l’impression que Science&Vie était tombé dans une faille temporelle et qu’il était resté bloqué dans les années 60.

Donc, amis journalistes… On parle d’EXPLORATION spatiale, et plus de CONQUÊTE spatiale, merci, bisous. Et ce, depuis 1975 quand la guéguerre de kikalaplugrosse et kikipisslepluloin (voir à ce propos mon billet sur l’histoire des femmes dans l’exploration spatiale) s’est terminée entre les USA et l’URSS. Et ce n’est même pas moi qui le dis, c’est vous !! Je cite, pp. 106-107 : « Quand Nixon cherchera à afficher sa politique de détente avec l’Union soviétique, c’est une mission spatiale conjointe qui est choisie comme symbole, avec l’amarrage dans l’espace des vaisseaux Apollo et Soyouz en 1975.« 

Alexeï Leonov et Deke Slayton. Juillet 1975.

Le mot « conquête » s’inscrit dans un contexte historique, et j’estime donc qu’il n’est absolument plus légitime depuis 1975. Vous avez 38 ans de retard, les gars. Parce que, bon… Que vous l’ayez mal utilisé une fois ou deux… ça peut arriver. Éviter les redites de vocabulaire dans un papier, faute d’attention… Ça arrive, bien sûr. Mais là, non. Non. « Les nouveaux enjeux de la conquête spatiale« , c’est écrit en orange sur noir sur votre couv’ !!

Seriously ?? Les nouveaux enjeux de la conquête spatiale ??? Mais vous sortez d’où ? Vous étiez dans un bunker, ces 40 dernières années, sans déconner ? Admettons que dans le mot « conquête », il y ait l’idée de déflorer des sols extraterrestres… Quelqu’un vous a dit qu’on n’est pas retourné sur la Lune depuis… 1972 ?

Bon… Bon mais admettons que vous ayez voulu faire de l’excès de zèle et qu’on mot agressif sur la couverture ait servi à appâter le chaland. Admettons. Comment vous expliquez… ça ??

Pour les besoins de ce billet, j'ai surligné toutes les "conquêtes"...

... Je pensais faire du surlignage. Pas du coloriage.

Reprenons tout depuis le début, si vous voulez bien. Déjà, que veut dire « conquête » ? Je demande à mon fidèle Larousse : « action de conquérir ». Oui, bon, ok, alors… Que veut dire « conquérir » ?

Soumettre… armes… se rendre maître… maîtriser… dominer…
Dites donc, Science&VieÇa vous dirait pas, en 2013, d’arrêter d’utiliser des mots qui veulent dire des choses aussi barbares, mmh ?… Vous voulez faire passer quoi, comme message, en utilisant encore le mot « conquête » ? Que les agences spatiales, les gouvernements, les ingénieurs, les techniciens, les scientifiques et les astronautes sont des hommes-blancs-occidentaux-assoiffés-de-sang qui livrent une bataille armée contre l’espace pour mieux s’en rendre maître et le dominer ?…
Vous vous rendez compte que cette dernière phrase n’a absolument aucun sens, ou… ?

Le mot « conquête » avait un sens quand l’accès à l’espace était une arme politique, idéologique, tactique, militaire, et de propagande, quand les USA et l’URSS jouaient donc à kikalaplugrosse et kikipisslepluloin – jusqu’en 1975, donc. Mais aujourd’hui ?…

Aujourd’hui vous êtes vraiment sûrs, Science&Vie, que les États sont dans le même état d’esprit et que le secteur spatial représente une volonté de domination et de pouvoir sur les petits copains dans la cour de récré mondiale ? Ou est-ce que, par hasard, au moins dans ce secteur, ne nous serions-nous pas assagis ?…

Pour répondre à cette question, allons voir du côté des sites des agences spatiales. Je me rends sur le site de la NASA, puis dans « à propos de la NASA ». Et tout de suite, avant d’aller plus loin, ce petit macaron sur la colonne de gauche…

Je traduis. « La vision de la NASA – Atteindre de nouvelles hauteurs et révéler l’inconnu de manière à ce que toute l’humanité puisse bénéficier de que nous faisons et de ce que nous apprenons. » Voilà. Et puis personnellement, je ne vois aucune petite étoile qui renverrait vers des nano-caractères en bas de page disant : « Enfin bon, ça vaut pour toute l’humanité sauf pour ces salauds de Russes, pour les faces de citrons qui commencent à nous tataner le bourrichon sévère, et pour les ispices di counasses qu’on voudrait bien continuer à conquérir en les maîtrisant avec nos grosses fusées puissantes. » Je vois ça nulle part. Donc bon.

Mais continuons. Rendons-nous sur la page « What NASA does« . Mais oui, tiens ? Qu’est-ce qu’elle fait donc, la NASA ? Je vous la fais courte, hein : elle EXPLORE, dites donc. C’est fou, ça ! Elle explore, elle fait des sciences, de la recherche, de la technologie, dans le spatial, dans l’aéronautique et dans l’économie. Et une petite recherche rapide sert à confirmer que le mot « exploration » apparaît 4 fois dans cette page, pareil pour le mot « explore(s) », et qu’en revanche les mots « conquest » et « war » sont aux abonnés absents.

Un peu comme si le mot « conquête » quand il s’agit de spatial ne s’utilisait plus depuis des dizaines d’années.

Mais vous allez me dire qu’il n’y a pas que la NASA dans la vie : vous avez absolument raison. Allez voir du côté de notre Agence Spatiale Européenne (ESA)… Le premier mot que l’on trouve sur la page « Space for Europe » est « exploring« . Quelle surprise !

Et dès la première ligne de « ESA’s purpose« , nous avons : « (…) pour des objectifs exclusivement pacifiques (…)« . Et donc l’ESA, ben elle explore, elle fait des sciences, de la recherche, de l’industrie, des satellites, etc pour faire avancer la connaissance et aider l’humanité dans des tas de domaines (sciences, observation de la Terre, télécommunications, navigation, etc…) Je vous fais grâce du nombre d’occurrences du terme « exploration » et de l’absence totale de « conquête ».

Du côté de Roscomos, l’agence spatiale russe, maintenant… Je vous accorde qu’il est beaucoup question de choses militaires – apparemment l’agence est très liée au ministère de la Défense, d’après ce que j’ai compris. Mais… ça fait des dizaines d’années que l’agence russe est alliée avec notamment la NASA et l’ESA sur de nombreux projets… Et voici un extrait de leur site (la traduction Google est un peu aléatoire mais on comprend le principal) :

Evidemment, aucune trace du mot « conquête » et 4 occurrences de « exploration ».

Et du côté des Chinois, qui n’ont pas la réputation d’être des rigolos et qui font station spatiale à part ? Ce sont des poignées de mains avec l’ESA, des échanges par-ci, de la coopération par-là dès la home du site

Quant à la suite, c’est du même acabit : science, technologie, industrie, échanges et coopération avec une liste de pays longue et solide comme un boa constrictor :

Et je rappelle que le Traité de l’espace, traité international datant de 1967, stipule en gros que l’espace est un bien commun. Et quand dans ce texte, le mot « conquête » n’apparaît jamais – en revanche, il y a 18 occurrences de « exploration ».

Voilà. Je pense avoir expliqué avec suffisamment de preuves à l’appui que plus personne n’utilise le mot « conquête spatiale » parmi les organisations de ce domaine et les personnes qui y travaillent. Si vous pouviez donc, amis journalistes, remplacer une fois pour toute cette expression datée – et fausse dans le contexte actuel – par l’expression « exploration spatiale », ce serait rigoureux et juste (ne serait-ce que du point de vue historique si on met de côté l’éthique) et j’estime que c’est quand même la base de votre métier (allez, je m’inclus dedans, j’ai mon diplôme).

Mais essayons de comprendre encore pourquoi tu utilises ce terme, cher Science&Vie… (parce que je t’aime bien, au fond, tu m’accompagnes depuis si longtemps.) Ton hors-série s’intitule « Aller sur Mars » et tu titres ton premier gros dossier « Conquête de Mars« . J’imagine que dans le mot « conquête », tu entends que poser le pied sur Mars voudra dire qu’on l’aura conquise. Sauf que… sauf que là encore, avec tout le respect et l’admiration que je te dois, tu te trompes.

Déjà, cela fait des dizaines d’années que les agences spatiales s’allient entre elles pour mener à bien des projets qui coûteraient trop cher pour une seule agence. Ça ne t’aura pas échappé que la station spatiale internationale est internationale, par exemple, ou encore que la mission Cassini-Huygens était une mission NASA-ESA (Huygens, sonde européenne, objet le plus lointain à s’être posé sur un monde extraterrestre, à savoir Titan), que la superstar Curiosity a des instruments français à son bord et que la NASA ne bouge pas d’un pète avant d’avoir consulté Toulouse, et que la future mission ExoMars sera conjointe ESA-Russie.

Or, une mission habitée vers Mars coûtera bien plus cher que tout ce qui aura été mis en place jusqu’à présent (à part l’ISS, peut-être), et qu’il est très, très peu probable que la NASA prenne en charge le budget total de l’opération. Il n’y aura donc pas de « conquête » dans le sens où les Américains réaliseraient à nouveau l’exploit, seuls, de poser le pied pour la première fois sur une autre planète. La conquête idéologique et politique de la Terre par une seule nation n’aura plus lieu.

C’est donc géopolitiquement faux de parler de « conquête » de Mars. Mais c’est également faux du point de vue sémantique. Va-t-on soumettre Mars par les armes ? Non (mais ce serait une jolie ironie, pour un dieu de la guerre…) Va-t-on la gagner ? Non. Ça n’a aucun sens de dire qu’on va gagner une planète. Va-t-on la maîtriser, la dominer, s’en rendre maître ? Mais enfin… Tout ça ne veut absolument rien dire du tout !!

Quand allez-vous comprendre qu’on ne maîtrisera aucune planète (pas même la nôtre, et de moins en moins !), pour la simple et bonne raison que nous sommes des êtres, certes intelligents et conscients mais organiques, petits et fragiles, et que nous ne sommes rien face aux éléments et que, hormis la Terre, absolument tout dans le cosmos, en l’état des connaissances actuelles, nous est parfaitement hostile ?…

Quand allez-vous apprendre à être humble face à tout ça, à commencer par le vocabulaire employé ?… Les mots ont un sens qu’il ne faut pas prendre à la légère.

On ne conquiert rien du tout. On explore – avec prudence, avec respect, et surtout avec une grande humilité. L’autre jour, j’ai répondu à une interview concernant ma candidature pour Mars One sur le site Civilisation 2.0. On m’a demandé si j’avais une idée des premiers mots que j’aimerais prononcer sur Mars, et j’ai répondu que j’aimerais que ce soit une déclaration à Mars.
« Bonjour Mars, merci de nous accueillir sur ton sol. Nous, humains de la planète Terre, te promettons de te respecter et de rester humble face à toi. Nous venons apprendre à mieux te connaître avec bienveillance et nous espérons que tu toléreras notre présence. » Déclaration qu’on accrocherait et qu’on s’efforcerait de respecter et de ne jamais oublier.

Voilà la différence entre conquête et exploration : dans la première, on arrive avec un sentiment de puissance, de domination et une volonté de s’approprier ; dans la deuxième, on vient demander humblement un dialogue scientifique avec un élément que l’on respecte dans une quête de connaissance dénuée de toute idée de violence, de puissance, ou d’appropriation et mue par la curiosité la plus saine qui soit.

Luca Parmitano jouant à Superman dans l'ISS

En plus, nous savons que l’espace, Mars, et tout ce que Science&Vie nous voit conquérir nous sont absolument hostiles. On ne joue plus les caïds depuis bieeeen longtemps – je crois qu’aucun(e) astronaute ayant volé ne s’y soit même risqué – et Luca Parmitano, actuellement dans l’ISS, l’a d’ailleurs rappelé dans un billet de blog très émouvant sur son incident lors d’une sortie extra-véhiculaire il y a quelques semaines (il avait failli se noyer dans son casque) et intitulé « Explorer la frontière« . Voici la traduction des dernières lignes de ce billet :

« L’espace est une frontière dure, inhospitalière et nous sommes des explorateurs, pas des colonisateurs. Les compétences de nos ingénieurs et la technologie qui nous entoure font que les choses nous apparaissent simples alors qu’elles ne le sont pas, et peut-être qu’on l’oublie parfois. On ferait mieux de ne pas l’oublier.« 

Je crois que tout est dit. Donc vraiment, amis journalistes, chroniqueurs ou blogueurs, s’il vous plaît, essayez de n’utiliser le mot « conquête » que dans un contexte historique précis (ou faites tourner si vous avez des amis journalistes, chroniqueurs ou blogueurs).

Ah oui… et même chose pour le mot « colonisation », par pitié. Si on pouvait plutôt parler de « base scientifique ou humaine », hein… Il y a autant de non-sens et de sous-entendu belliqueux, agressif et violent dans « colonisation » que dans « conquête ». Et le mot « colonisation » apparaît bien trop souvent également dans ce hors-série. Et s’il se peut que dans un futur lointain le terme soit approprié, ce n’est encore pas du tout le cas.

Autre chose qui m’a passablement agacée dans ce numéro : la référence au rêve. Ce n’est absolument pas gênant en soi, au contraire, puisque le spatial a toujours eu le rêve comme moteur. Mais j’ai ressenti très fortement de la part de Science&Vie un certain mépris. Et là, ça commence effectivement à me gêner un petit peu.

Exemple, p.111 : « Cela n’a certes pas le souffle d’une colonisation humaine, mais cela contribue toujours à en maintenir le rêve. »
Moi je comprends : « On n’est pas capable d’être de bons petits soldats belliqueux et d’aller conquérir Mars, mais bon, puisque ça continue à faire fantasmer ces braves gens, oh oh oh… », semble conclure ce journaliste avec une ironie pleine de condescendance.

Autre exemple, p.133 : « Certes, convient Jean-Pierre Luminet, il y a dans ces projets un peu d’utopie et beaucoup d’économie. Mais ils n’en permettent pas moins de développer de nouvelles technologies, et de faire avancer la science. » Faire avancer la science… [Oui, faire avancer la science. Le monsieur essaye de te dire que le rêve et l’imagination contribuent à la créativité et donc à l’innovation, et donc au progrès, et donc à la connaissance. Ça te parle, ou… ?] Vers une conquête encore plus lointaine ? [Putain mais t’es décidément complètement à côté de la plaque.] Mars aurait-elle de vraies richesses à nous offrir ? « En l’état actuel de nos connaissances géologiques, Mars n’aurait aucune ressource intéressante à exploiter », assure Francis Rocard. [Aaaah, d’accord. Donc dans ta question, « vraies richesses » voulait dire « espèces sonnantes et trébuchantes ». OKÉ. Donc la science et la connaissances sont de fausses richesses. Très bien. Je note.] Si ce n’est du rêve… [Phrase qui conclut 5 doubles-pages de dossier. Mais si ça fait rêver la brave méménagère de moins de 50 ans, hein, alors tout va bien…]
COMMENT TE DIRE.
Alors certes, il faut remettre cet extrait dans le contexte d’un article sur l’exploitation minière des astéroïdes – d’ailleurs intitulé, je vous le donne en mille…

Et "À la recherche de l'astéroïde idéal", par exemple, non ?... Non. Ok.

Mais ce cas, que vient foutre Mars là-dedans ??

Dernier exemple, p.144 : « L’idée tient aujourd’hui du doux rêve… » On parle d’aller voir une exoplanète. Effectivement, il nous est impossible d’accéder à une exoplanète en l’état de nos compétences et de connaissances techniques en terme de voyage spatial. Mais l’expression « doux rêve », avec toute la connotation de mépris et de condescendance qu’elle implique, était-elle vraiment utile ?… Je ne sais pas. Oui, pour le moment c’est de la science-fiction. Et alors ? Ça mérite d’être rejeté d’une main méprisante ? Je rappelle que sept ans avant les premiers pas sur la Lune, un être humain sur la Lune était de la science-fiction. Et pourtant on l’a fait. En seulement sept ans !!

Cher Science&Vie… Je vais terminer ce billet amer en citant l’astronaute français Thomas Pesquet.

« Dans le domaine de l’exploration spatiale il faut croire à la science-fiction. Moi j’y crois depuis que je suis tout petit. Ça m’a aidé à me dépasser. Ça m’a permis de réaliser des choses qui me paraissaient hors de portée comme devenir astronaute.« 

Ce jeune homme est devenu astronaute parce que c’est un rêve qui l’a porté. Méprisez-vous toujours ce rêve ? Quand vous êtes face à un petit garçon ou à une petite fille qui vous dit qu’il/elle aimerait bien devenir astronaute, je suis sûre que vous êtes du genre à ricaner et balayer ça d’un revers de la main – et je crois que je vous déteste pour ça 🙁

« J’espère vous avoir convaincu qu’il faut croire en l’exploration spatiale, qu’elle est bénéfique, qu’elle permet de se dépasser et de rêver un peu au-delà de son échelle individuelle, et ça, l’Homme en a bien besoin…« 

Ce sont les mots de conclusion de Thomas Pesquet, donc, lors de sa présentation à TEDx Paris l’année dernière que je vous conseille vivement de regarder.

 

Tu remarqueras, Science&Vie, que Thomas Pesquet se trompe en disant « conquête » et se reprend aussitôt (à 5’25). Tu sais pourquoi ? Parce que nous baignons dans un monde où l’expression « conquête spatiale » est encore utilisée beaucoup trop souvent. Les médias en sont en grande partie responsables et coupables. Tu l’es aujourd’hui.

En tout cas, j’espère qu’après tout ça tu changeras d’état d’esprit concernant la conquête l’exploration spatiale et le rôle du rêve dans ce domaine.

Oui, tu m’as déçue, mais ça me rend triste comme quand un ami nous déçoit. Je te suis depuis des années, je te dois énormément, et il y a plein de choses intéressantes dans ce numéro, mais j’ai tellement eu l’impression que tu étais resté bloqué dans les années 60 où tout ce qui a déjà été fait relève de la conquête agressive (ce hors-série suinte d’une violence sous-jacente due à ce terme) et où tout ce qui reste à faire relève du doux rêve pour personnes pas très sérieuses que j’ai eu bien du mal à apprécier ses bons côtés.

Mais si tu souhaites te défendre, j’accueillerai avec joie un droit de réponse ici-même. Je t’aime bien quand même et les jours où je te reçois dans ma boîte aux lettres restent toujours pleins de joie.

22 réflexions sur « [HUMEUR] STOP à la conquête, oui à l’exploration ! »

  1. Bonjour
    votre article est très bien écrit et nous rappelle bien que l’usage des mots peut être lourd de sens.
    Je fais souvent le rapprochement avec le monde du cinéma et de télévision : donc le mot « exploration » me fait penser à Star Trek, avec son équipage cosmopolite et qui cherche le plus souv. Tandis que le mot « conquête » me fera plutôt penser à… Avatar. Je suis à peu près certain en plus que ceux qui emploie les mots « colonisation » et « conquête » doivent verser leur petite larme devant les méchant ‘numains’ qui ont détruit le ‘bô narbre’ de la nature merveilleuse de Pandora.

    En aparté, je viens de voir la bande annonce du prochain film de Christopher Nolan, Interstellar, en espérant qu’il vienne rappeler au monde la nécessité impérieuse de continuer à explorer notre cosmos (et tenter d’aller nous installer durablement et respectueusement sur d’autres planètes pour préserver la conscience).

      • Premier commentaire, première correspondance. Conquête spatiale, exploitation des ressources, prédation ! J’ai tout de suite pensé au film Avatar comme VIOTTI Philippe. Effectivement quand on y apporte des connaissances, on se sent moins bête, le mot « conquête » aura un autre sens dans ma tête désormais.

  2. Pour moi qui veux devenir astrophysicienne et planétologue, lire cet article m’a fait vraiment plaisir. J’ai tendance à beaucoup croire les diverses conséquences que je lis et vois dans la Science-Fiction (style, justement, les humains qui font la guerre aux autres formes de vie dans le but de dominer, etc). Alors de voir que la presque totalité des Agences Spatiales emploie les termes « exploration pacifique », moi, ça me rassure, même si je ne doutais pas de leurs buts. Puis de voir qu’il y

  3. Bien évidement que les mots sont important d’autant plus venant d’un journaliste (oups journaliste, je m’interroge, est-ce le bon mot..;) dont c’est le métier de choisir les mots pour former un texte juste. Bon manifestement, en l’espèce, le mot conquête est utilisé délibérément dans un but précis, celui d’amplifier exagérément l’action voire de lui donner une apparente impossibilité : Explorer -> oui c’est possible, nous avons les moyens financiers et techniques/ Conquête -> impossible, ça va pas non, trop cher, trop couteux et puis on n’a pas encore la technologie. Ne serait-ce pas de la manipulation ?

    Aparté non sans rapport avec le sujet : Prenons le mot démocratie. Terme utilisé abondement dans les journaux et média pour décrire nos états occidentaux. Mais prenons son vrai sens : dêmos (« peuple »), kratos (« pouvoir »). source wiktionnaire. Mince mais cela ne décrit pas du tout notre société ça par exemple. En effet, où est donc le pouvoir du peuple dans une société dont le peuple n’exerce son droit de vote pour élire l’homme le plus puissant du pays une fois tout les cinq ans parmi des candidats qu’il n’a jamais choisi ? Ainsi, le vrai mot qui doit être utilisé pour décrire nos états c’est oligarchie : olígos (« petit », « peu nombreux »), et árkhô (« commander »)) est une forme de gouvernement où le pouvoir est réservé à un petit groupe de personnes qui forment une classe dominante.
    Continuons : Journaux : Synthèse de l’actualité (du jour, de la semaine…) par un organe de presse. Mince encore loupé. En effet, l’organe de presse est possédé par une multinationale qui en général le finance à perte pour la bonne et simple raison que ceux qui dirige font parti de cette fameuse classe dominante oligarchique et donc pour terminer au travers de leur média font de la propagande en faveur de ceux qui sont au pouvoir!

    Conclusion : Florence a un trillion de fois raison de préciser l’importance du poids des mots et que respecter leur sens réel pour passer un message ne peut qu’abonder dans le sens d’une vrai démocratie! Ainsi utiliser le mot « conquête » est une tentative de manipulation du jugement du lecteur qui ne peut être qualifiée que de malhonnête de la part de l’auteur! (Tiens ? une rime!)

  4. L’expression « conquête de l’espace » a toujours un sens mais n’a plus celui de la guerre froide et n’est surtout pas encore d’actualité (et on ne sait pas s’il le sera). Pour l’instant il est relativement compliqué d’envoyer des choses sur orbite, encore plus de parcourir les échelles de distances entre les corps célestes et sans parler du fait qu’il est aussi très difficile de fabriquer des modules habitables entièrement autonomes sur de longues durées.

    Du coup tout projet d’envergure d’exploitation des ressources présentes dans le système solaire (voir de l’univers, mais là on y est encore moins) est de l’ordre de la science fiction (même si une paire d’entreprise ont pour projet de récupérer des astéroïdes à l’aide de robots). De ce fait on est encore loin (dans la pratique) d’une logique de conquête de l’espace, mais qui sait ce que l’avenir nous réserve sur le très long terme.

    Aussi, on pourrait envisager une conquête non pas d’états sur l’espace mais de l’humanité sur l’espace (dans une dynamique internationale, comme ce qui se met en place depuis une paire de décennies). Dans tous les cas, le fait qu’il ne soit pas possible de le faire actuellement n’implique pas que le concept ne puisse pas exister (au moins comme une vue de l’esprit).

  5. Voilà un article qui fait du bien, car après tout au delà de cet exemple on fait de moins en moins attention au sens des mots que l’on emploie… Moi le premier ! Mais promis, je bannis « conquête spatiale » de mon vocabulaire 😉

  6. Il va s’agir de conquête hélas, car ce sera toujours le premier à ceci, le meilleur à cela, le plus grand territoire, le plus beau champs d’herbe verte qui est bien meilleure chez le voisin. Je serais étonné que certaines mœurs « policées » subsistent longtemps dès les premières découvertes exploitables et là-bas la gendarmerie de l’ONU la plus proche …
    Ceci ne m’empêche aucunement d’apprécier cet article, en vous en remerciant.

    • Et tu sais pourquoi ? Parce que je l’ai écouté en direct et que j’étais dans la chatroom, et que j’ai menacé dès le début de tuer un chaton à chaque fois que le mot conquête serait prononcé hors contexte historique… Ça a plutôt bien marché :p

  7. Bravo pour votre article Florence et la manière de développer votre point de vue.
    Depuis la nuit des temps, partout ou a été l’homme il a changé ce que la nature avait mis des millions d’années et ce à son avantage.
    Je crois que l’exploration n’est qu’un début, qui laisse la place à la conquête dans le sens où vous l’entendez.
    La NASA se trouve dans le pays le plus libéral du monde, il y a peu de place pour la culture aux US, très peu, les explorateurs sont de bonne foi, je vous l’accorde, il me semble peu probable que le système US, mette le moindre $ sans se dire ce qu’il va rapporter un jour ?.
    Je ne crois pas dans la générosité de l’être humain,(elle est rarissime) même si je me répète les explorateurs sont de bonne foi, les intérêts économiques prendront tôt ou tard l’ascendant.
    A l’heure où je vous écris, les conquêtes sont encore nombreuses sur Terre, il suffit de regarder l’actualité, pourquoi en serais t-‘ils autrement sur les étoiles ?
    Le seul espoir que j’ai est que jamais la science a été aussi loin, jamais l’être humain, n’a eu droit à autant de connaissances. (tout dépend aussi ou l ont ce trouve sur la planète).
    J’aimerais que l’exploration spatiale, ai pour but les seules connaissances de l’univers, j’aimerais me montrer moins pessimiste, j’aimerais surtout que vous ayez 100 % raison et moi tords %
    Mais quand je vois de quoi l’homme est capable sur la planète !.
    L’être humain dois changer de système avant de s’envoler vers les étoiles, la vie n’est qu’une compétition dé sa naissance, changer le système qui veut cela, L’homme changera de mentalité aussi.
    Votre article c’est une bouffée d’oxygène.
    Portez vous bien

  8. Et s’il s’agissait simplement de conquête amoureuse ? Séduire cet inconnu qu’est l’espace ? Qu’on s’y fasse une place, dans cet organe à la fois corps et cœur qui nous séduit lui-même sans qu’on ne sache vraiment qui il est… Qu’il nous remarque, qu’il nous accompagne et nous rassure… Conquérir, chercher à atteindre, ramener avec soi, en soi, sans assujettir, en laissant intact cet objet de notre contemplation, en le laissant pur car nous l’aimons comme tel. Lui-même nous a conquis, finalement, pour qu’on en arrive à tant l’aimer et le désirer, pour qu’on ait à ce point envie de l’arpenter et de l’explorer.
    La conquête n’est pas que militaire, guerrière, méprisante ou néfaste. Elle est aussi amoureuse, sans blessure à la clef, sans mutilation. On ne sait pas si on y trouvera de l’adversité : on se lance peut-être uniquement à la conquête de nous-mêmes. Et cela, à ce que j’en sais, est vital.
    A l’assaut des cœurs, à l’assaut de soi…
    (P.S. : je comprends cependant ce que tu veux dire, hein ? Je voulais juste penser que la poésie n’est pas morte. Quels que soient les mots que l’on emploie, il reste que cette conquête-là — et peut-être d’autres le furent-elles… — est née de notre émerveillement. Et on n’oublie jamais le regard que l’on a porté la première fois sur l’objet de notre désir et de notre amour.)

    • oui c’est très poétique etou mais la « conquête » amoureuse n’est pas toujours sans mépris ni blessure ou humiliation et l’assaut de soi peut amener aussi à ne pas trop faire attention au consentement…
      C’est pour quoi le mot conquête est si présent dans l’imaginaire masculin et fait autant de dégât

  9. j’ai découvert votre univers hier par hasard. Modeste astronome amateur, modeste prof de sciences: je vous dis BRAVO BRAVO BRAVO et encore BRAVO.
    Vous illuminez les fêlés…la lumière passe!

  10. C’est peut-être une question de génération : j’ai grandi dans ce vocabulaire, et ça ne m’a même pas choqué. Pourtant c’était effectivement là comme le nez au milieu de la figure, et je suis entièrement d’accord avec votre saine réaction. Je vais citer une phrase extraite de « Voyage » de Stephen Baxter : « Même si l’aventure spatiale ne nous apporte rien d’autre que la conscience de notre propre nature, l’investissement est amplement justifié ».

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