Le ballet « Joyaux » de George Balanchine fera l’objet de 15 représentations entre le 21 octobre et le 18 novembre 2009 à l’opéra Garnier. La promotion 2010 du Master 2 de Journalisme Culturel a pu assister à la répétition générale du 16 octobre, dans une ambiance à la fois studieuse et informelle.
Quoi de plus alléchant en ces temps de crise que des joyaux servis sur un plateau d’argent ? L’invitation fut la bienvenue. Nous avons réussi à nous extraire, le temps d’une soirée, de nos chambres de bonne étriquées pour nous retrouver dans l’immensité étourdissante et fastueuse du Palais Garnier. Et le luxe de l’espace fit place à l’éclat des bijoux : les tableaux « Emeraudes », « Rubis », et « Diamants » nous furent présentés comme autant de confiseries acidulées. Un triptyque aux couleurs éclatantes pour nous faire oublier la grisaille quotidienne.
Si Joyaux est un unique ballet en 3 actes, chacun des tableaux a son indépendance. « Emeraudes », pièce d’ouverture dans un décor simpliste aux tons verts assorti aux costumes, évoque le ballet romantique français sur des extraits de Pélléas et Mélisande etShylock de Gabriel Fauré. De pointes en entrechats, de pas de biche en arabesques, les danseuses et les danseurs évoluent sur la scène dans un ensemble architectural et monumental qui n’est pas sans évoquer une certaine froideur. Les chorégraphies, convenues et sans surprise, sont cependant interprétées avec une grâce sans égal. L’absence de narration métamorphose ce premier tableau en un long poème désincarné.
« Rubis » envoie les spectateurs dans un autre cadre spatio-temporel. Exit le romantisme français et ses mouvements codifiés, place à une chaleur plus américaine sur des tons rouges, accompagnés duCapriccio pour piano et orchestre de Stravinsky. L’influence des comédies musicales de Broadway est nette : les jambes en-dedans sont omniprésentes, les têtes apprennent la latéralité, et le music-hall se devine dans des chorégraphies gourgandines. Ce tableau rythmé et sensuel garde cependant cette élégance dans la symétrie qui renvoie sans aucun doute à la structure moléculaire d’une pierre précieuse.
« Diamants », enfin, ravive l’éclat du style impérial russe et de son maître, Marius Petipa, sur la Symphonie n°3 en ré majeur Op. 29 de Tchaïkovsky. Christian Lacroix, créateur des costumes et des décors, a choisi des tons bleus glacés pour ce tableau final. Des mouvements irréels mettant en valeur la féminité font de ces derniers instants une féérie. Peut-être parce que les diamants sont les meilleurs amis des femmes.
Dans tous les cas, ces joyaux-là ont inspiré à Balanchine des phrasés et des articulations dignes des plus grandes parures, dont les harmonies chromatiques couplés aux mélodies classiques composent un ballet étincelant pour les sens.