J’ai vu les deux récentes adaptations de La guerre des boutons, sorties à une semaine d’intervalle au cinéma. Il n’y a donc pas de raison que je ne me fende pas d’un petit comparatif, moi aussi…
La nouvelle guerre des boutons
Christope Barratier
(avec Laëtitia Casta, Guillaume Canet, Kad Merad, et Gérard Jugnot)
Nous sommes en 1944. Les enfants de deux villages auvergnats, Longeverne et Velrans, s’affrontent dans une guerre dont le but est de dépouiller de ses boutons les vêtements de la bande ennemie. En arrière-fond de ce conflit finalement tendre, une jeune femme du village revient de Paris avec Violette, qui s’avère être une petite fille juive…
L’adaptation
Le roman est donc transposé pendant la Seconde Guerre Mondiale. J’avais vraiment peur au début d’un effet pathos ou leçon de morale, mais le contexte historique sert l’histoire et l’enrichit, et non l’inverse. Le scénario, en ce sens, est parfaitement équilibré.
La guerre des boutons en elle-même semble fidèle à l’originale (de ce dont je me souviens…) et malgré quelques longueurs dans l’évolution des batailles, cela reste très plaisant.
Les comédiens
Bon. J’ai du mal avec Guillaume Canet. Je le trouve mauvais comédien (même si je l’apprécie en tant que réalisateur). Il a la diction d’un poulpe mort et l’expressivité d’une loutre. Je lui accorde une chose : il est fidèle à lui-même, on n’est pas surpris.
Laëtitia Casta se défend plutôt bien. Je n’ai pas été bluffée, loin de là, mais je m’attendais à bien pire. (En même temps, difficile d’être plus mauvais que Guillaume Canet.)
Les enfants sont globalement très bons. On sent le travail d’un metteur en scène derrière et ils sont bien dirigés. (Je… non rien. J’allais encore… Guillaume Canet, toussa… Je me tais.)
Quant aux seconds rôles, ils sont tout simplement excellents. On retrouve d’ailleurs toute l’équipe des Choristes (c’est le même réalisateur) : Gérard Jugnot, Kad Merad, Marie Bunel et Grégory Gatignol.
Le petit Gibus
On atteint ce que je décide d’appeler « le point Pépinot ». Vous savez, ce petit garçon mignon des Choristes ? Ben là, Barratier a voulu faire la même chose avec le Petit Gibus (déjà emblématique, c’était donc pas la peine d’en rajouter).
Sauf que dans les Choristes, Pépinot était mignon parce qu’il était naturellement mignon. Là, le Petit Gibus est mignon parce qu’on lui a dit : « Tu seras le petit garçon mignon. » Alors c’est mignon les dix premières minutes, mais après t’as juste envie de lui dire ta gueule ou de le voir muer.
La réplique qui m’a fait rire
[Les parents Lebrac (Marie Bunel et Kad Merad) à propos de leur fils]
– Y aurait une petite là-dessous que ça m’étonnerait pas…
– Lui ?? Il ferait peur à la volaille !
Verdict
C’est une très bonne adaptation, parfaitement bien équilibrée au niveau du scénario, avec des enfants très bien dirigés et des seconds rôles savoureux. Il y a des paysages magnifiques et la reconstitution des batailles est très tendre. Même avant 30 ans, on se prend à être nostalgique d’une époque qu’on n’a jamais connue, où l’on pouvait courir dans les champs, faire des cabanes dans la forêt, être totalement insouciant et s’érafler les genoux sans porter plainte contre le propriétaire des barbelés qui n’auraient jamais dû être là. (Je caricature.)
C’est vraiment un film anglé sur ces enfants qui s’amusent, qui vivent leur enfance à fond, qui se construisent des souvenirs émerveillés qu’ils garderont comme un trésor jusqu’à la fin de leurs jours, malgré un quotidien de guerre pas toujours facile à vivre.
La guerre des boutons
Yann Samuell
(avec Mathilde Seigner, Eric Elmosnino, Alain Chabat, Fred Testot)
C’est l’histoire d’un soi-disant cancre qui devient premier de la classe. Ou plutôt non. C’est l’histoire d’une petite fille garçon manqué féministe avant l’heure. Ou… non, c’est pas encore ça. C’est l’histoire d’une bande de gamins sadiques qui arrachent des boutons avec un regard de psychopathe. Non. Pas encore. C’est l’histoire de quelques adultes qui ont toujours douze ans et demi mais on n’y croit pas vraiment. Non. C’est… En fait on sait pas trop ce que c’est. Ce film ressemble autant à La guerre des boutons que moi à Paris Hilton.
L’adaptation
Je me demande si on peut parler d’adaptation tellement peu d’éléments de la version originale s’y retrouvent. On a gardé les noms (villages et personnages) mais la structure globale a disparu. Quand ça parle d’une guerre des boutons, on se demande ce que ça vient foutre dans le scénario. C’était un prétexte pour faire du fric sur un titre connu, je pense. (Au moins, l’autre a eu la décence de rajouter « nouvelle ».)
On a voulu ajouter des touches modernes à l’ensemble, mais ça fait des gros flop. Par exemple quand un des gamins orthographie mal un mot en disant : « Avec un A majuscule ! » En fait, ça fait référence au « Je t’emmerde avec un grand A » du loft, mais qu’il aurait fallu reprendre tel quel pour que ce soit drôle. Raté, les gars. Ou alors amener cette histoire de fille-qui-est-égale-à-un-garçon. Ok mecs, mais en 1956-1957, je ne suis pas tellement sûre que ce soit cohérent. Mais bon.
Le réalisateur, qui avait certainement conscience de la pauvreté de son scénario s’est dit que ce serait peut-être une bonne idée d’appeler des comédiens estampillés Canal pour sauver le bousin. Alors du coup on a Alain Chabat et Fred Testot qui viennent faire leur sketch pendant 5 minutes à intervalles réguliers, mais comme des cheveux sur la soupe rédactionnelle.
La vulgarité
C’est censé être un film aussi pour les enfants – d’ailleurs il y en avait plein dans la salle. Sauf que dans le premier quart d’heure, il y a un enchaînement de répliques toutes plus vulgaires les unes que les autres. A la Canal, finalement, quand j’y pense. Sauf que dans la bouche d’enfants de 10 ans et dans les oreilles des gamins dans la salle, ça m’a mise très mal à l’aise. J’ai même trouvé ça honteux, en fait. Parce que finalement, ça ne sert même pas l’histoire.
Le malaise
Contrairement au film ci-dessus, il n’y a rien de tendre ni de bon enfant dans le peu de guerre des boutons qu’on peut voir dans celui-ci. Et le peu représenté donne un peu envie de ne pas savoir où se foutre. Il y a une vraie volonté d’humilier dans celui-ci, et je ne suis pas sûre que ça fasse partie de l’histoire d’origine. La bande à L’Aztec, dirigée de cette manière, passe vraiment pour des psychopathes sadiques. Pas sûre que ce soit utile, en fait.
Les incohérences
La mère de Lebrac vit seule avec son fils et ses deux filles. C’est Lebrac qui est donc obligé, avant et après l’école, de s’occuper des bêtes, de la ferme, et du marché. Sa mère (Mathilde Seigner) se plaint sans arrêt de ne pas avoir assez d’argent pour survivre.
Mais elle te dit ça parfaitement maquillée, blushée, mascaratée, ombre à paupiérée, et brushinguée, tsé. Genre limite elle est très jolie (on parle bien de Mathilde Seigner, que j’aime bien par ailleurs, qui peut être belle mais pas spécialement « jolie »).
Et puis la petite fille qui a 3/20 en couture et qui 5 minutes après te pond un drapeau en vêtements grand comme un département parfaitement rectangulaire avec un bouton parfaitement centré et circulaire, tsé.
Et puis un des derniers plans… Ma sœur et moi, en cœur, nous sommes exclamé : « Mais LOL ! »
Voilà. Je ne spoilerai pas plus. C’est déjà amplement suffisant.
Les comédiens
Ils sont tous bons, mais c’est dommage qu’on ne comprenne rien à ce que disent la plupart des enfants. Déjà que c’est pauvre, on perd encore un peu plus de substance.
Mention spéciale pour Eric Elmosnino, que je ne connaissais pas.
Le Petit Gibus
Là encore le point Pépinot est atteint, mais dans une moindre mesure. Quoique…
Verdict
On a regardé l’heure plusieurs fois. On s’est demandé où ils voulaient en venir. On a attendu longtemps que ça commence jusqu’au moment où on a compris que la guerre des boutons était juste un prétexte.
Bref, on a trouvé ça mauvais et… décousu (seule cohérence du tout, finalement). Dommage pour les comédiens, qui méritaient mieux que ça.