[NOUVELLE] Insoutenable légèreté d’une gymnaste

[Texte  publié sur Héros Ordinaires]

à Juliette

Quand j’étais petite, j’avais la tête pleine de héros. J’ai vite laissé tomber les princesses, niaises, pour m’enticher d’aventuriers, volontaires. Je dévorais le Club des Cinq, je me prenais pour Fantômette ; mais plus fascinantes encore étaient ces gymnastes. Yang Bo. Svetlana Boginskaïa. Nadia Comaneci. Des noms exotiques, qui ne disaient rien à personne sauf à mes camarades de classe.

Dès le CP, j’étais dans un cursus un peu spécial : sport-étude. Tous les jours, une demi-journée d’école, et une demi-journée au gymnase. Entendre le mot « gymnastique » dans la bouche de béotiens pour signifier tout exercice physique me rendait folle de rage. La gym, c’est un sport à part entière. Le sport le plus complet, le plus exaltant, et peut-être aussi le plus esthétique.

Trois heures par jour, nous étions donc en justaucorps pour les filles, et en short pour les garçons. Faire de la musculation pour être plus solide dans toutes les positions, faire de la souplesse pour pouvoir exécuter les figures imposées correctement. Maîtriser son équilibre, rétablir une position de hanche, apprendre le gainage, jambes tendues et pointes de pieds serrées.

Et des larmes. De la douleur. Insidieuse, parfois, comme celle dans mes genoux qui semblaient engranger toutes les ondes de choc de toutes mes réceptions. Vive, souvent, quand les entraîneurs tiraient sur nos jambes ou s’appuyaient sur notre dos pour nous assouplir. Sourde, régulièrement, quand les exercices de musculations répétés trop de fois ou maintenus trop longuement martyrisaient nos muscles d’enfants. Et des larmes, systématiquement.

Yang Bo

Le soir, épuisée et après avoir fait mes devoirs – heureusement qu’il ne me fallait pas beaucoup d’effort pour être la première de la classe – je lisais. La Bibliothèque Rose m’emmenait dans des univers où les enfants étaient presque indépendants, où aucun adulte ne leur imposait quoi que ce soit, où il leur arrivait des aventures passionnantes sans qu’ils aient besoin d’aller faire subir autant de souffrances à leur corps, quotidiennement.

C’était différent pour Fantômette. Elle était première de la classe le jour, et justicière la nuit. Elle s’en sortait souvent grâce à sa souplesse de chat, grâce à des rondade-flip-salto qui impressionnaient les voleurs. Moi je n’en étais qu’au saut de main, mais j’étais petite, encore. Alors je refermais le livre. Et avant d’éteindre ma lampe de chevet, je regardais les posters de mes idoles. Yang Bo. Svetlana Boginskaïa. Nadia Comaneci. Il n’y aurait pas qu’à l’école que j’aurais dix sur dix. En voilà des filles qui avaient réussi.

De toutes les promotions de classe gym, seulement deux ou trois éléments sortaient du lot. Je faisais partie de ceux-là. On m’a vite proposé d’intégrer les minimes – j’avais un niveau trop élevé pour les benjamines. J’étais de toutes les compétitions, les dimanches, avec les entraînements le mercredi et parfois le samedi. Et personne ne s’inquiétait de mes résultats scolaires. Je suis arrivée très vite au collège, et sans aucun effort de ma part.

Avec l’intensification des entraînements, mes genoux me faisaient souffrir de plus en plus. Mais je voulais devenir une championne, moi aussi. Comme Yang Bo. Comme Svetlana Boginskaïa, qui m’avait refusé un autographe mais de qui j’avais pu avoir un postillon. Emerveillement. Elle était si belle, si harmonieuse, ni trop musclée ni trop svelte, une taille de guêpe mais une puissance et une grâce incroyables.

Je me musclais toujours plus, je m’assouplissais encore, même si mon corps qui changeait semblait vouloir l’inverse. C’était moi qui décidais. J’avais le contrôle sur lui – c’était moi, non ? Il devait m’obéir. Je devais être plus stable dans mes réceptions, plus précise dans mes lâchers, plus rapide dans mes rotations. Je voyais les grandes s’alourdir à mesure qu’elles approchaient du lycée : elles étaient obligées de mettre des soutiens-gorges sous leur justaucorps, et leurs cuisses ne contenaient pas que des muscles. Horreur. Je n’en voulais pas. Pas de ça chez moi.

Nadia Comaneci

Le lycée était là. L’entrée en seconde a été une belle victoire : j’avais réussi à ne pas m’empêtrer de seins, je rentrais encore dans mon justaucorps préféré en velours que ma mère m’avait offert pour mes dix ans, et je n’avais pas ces règles qui obligeaient les autres à mettre des corsaires régulièrement. J’étais légère, gracieuse, j’avais battu le record du nombre de soleils d’affilée aux barres, et j’étais la seule de mon équipe à réussir le double-salto au saut. Je visais le triple carpé arrière.

Je ne comprenais pas pourquoi on m’emmenait voir un psy alors que j’aurais pu être au gymnase. Alors ça, ça me rendait folle de rage. Mes parents étaient fiers des bulletins que je rapportais, ils étaient fiers des médailles que je gagnais, il fallait que je fasse quoi ?? Que je rabaisse le niveau ??? Non. Moi, j’étais l’intello, et j’étais l’espoir du club. Je devais avoir ce dix sur dix. Svetlana Boginskaïa avait pu le faire. Pourquoi pas moi ? Il ne comprenait pas, de toute façon. Je ne lui parlais plus, ça servait à rien.

Je devais être plus légère, et perdre moins de temps à table où je me faisais chier. Je me dégoûtais moi-même quand j’avais 19 en SVT et quand je me demandais où j’avais bien pu être aussi conne pour donner une mauvaise réponse ; pas quand je regardais le miroir du praticable où j’étais à deux doigts de réussir le triple carpé. J’étais encore trop lourde. Il était con, ce psy. Fallait que je lui prouve que j’avais raison. Que je pouvais le faire. Pour qu’il soit fier aussi. Mais pour ça, fallait que je sois encore un peu plus légère.

Svetlana Boginskaia

Quatre jours avant les finales de zone où je devais me qualifier pour les championnats de France, je me suis retrouvée entre quatre murs verts pâles. C’était bien le comble, moi qui ne m’étais jamais blessée. Interdiction de voir mes parents tant que je n’avais pas repris cinq kilos. J’ai ri intérieurement. D’un air de mépris absolu. Cinq kilos. Ils étaient fous. Ils n’avaient jamais fait de poutre de leur vie, ma parole. Dix sur dix. Aucun déséquilibre. Ne pas dépasser de partout restait la meilleure stratégie. Et l’envol avant la réception sur le tapis devait être élégant. Puis le salut aux juges. L’envol. Le salut. L’envol…

J’ai 27 ans. J’ai soutenu ma thèse de cardiologie, qui sera publiée. J’ai étudié les effets d’une nourriture trop riche sur la veine cave supérieure. Mes patients viennent me voir pour soigner leurs excès – je ne leur en tiens jamais rigueur. Comme Fantômette, je rends service. Je sauve des vies.

Un photomontage, il y a quelques années, m’a violentée comme un coup de défibrillateur. Yang Bo et Svetlana Boginskaïa étaient plus harmonieuses que moi. Mes idoles, mes héroïnes, je rêvais de leur ressembler, et j’étais devenue à peine leur ombre. Trente-deux kilos pour un mètre soixante.

J’ai fini par décrocher cette qualification aux championnats de France. Je n’y suis pas allée, parce que je savais que j’échouerais. C’était inconcevable. Et je crois surtout… que j’avais peur de m’envoler et de ne jamais retomber. De rester en suspension au-dessus de mon corps affalé. Et décharné.

Je n’ai pas remis les pieds au gymnase depuis des années. Je ne suis pas prête, encore. Mais j’y retournerai un jour, parce que j’ai croisé des jeunes filles à l’air trop sérieux qui ont à peine la force de pousser la lourde porte d’entrée. Des filles trop légères, qui veulent gagner. Elles ont sûrement des idoles, elles aussi. Des idoles qui ont fait de grandes choses. Mais de grandes choses parce qu’elles mangeaient comme des sportives, avec appétit.

Un jour, je leur dirai comment leur ressembler. Un jour, comme mes coeurs fatigués de tant d’excès, je les ramènerai à la vie.

[CINEMA] Dix bonnes raisons d’aller voir Raiponce

Je n’avais pas autant ri devant un Disney depuis les fabuleux Aladdin et Hercule. Voici dix bonnes raisons d’aller voir Raiponce, le dernier-né des dessins animés conçu pour les petits comme pour les grands.

1. La beauté des images
On atteint là une perfection assez éblouissante. Il est loin, le temps de Blanche-Neige, ou même d’Aladdin. Ici, plus de dessins à la main, c’est l’ordinateur qui prend le relais. Et paradoxalement, il y a une vie dans le graphisme jamais égalé jusqu’ici.
Le diable est dans les détails, dit-on, alors Raiponce est diaboliquement bien mise en images. La texture de la peinture sur ses pinceaux, le bois où l’on peut voir jusqu’à la moindre écharde, la poêle à frire dont on peut détailler toutes les aspérités dues à l’usure et à des mets trop souvent brûlés… Sans oublier bien sûr les cheveux. Ceux de Raiponce, bien sûr, personnages centraux du film, mais également ceux de sa mère dont la crinière bouclée offre un rendu digne d’une pub Schwarzkopf. Jusqu’au duvet sur les tempes d’Eugène, tellement crédible qu’on a envie de caresser… (Et encore. Je ne l’ai pas vu en 3D.)

 

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2. L’expressivité des personnages
Les yeux des personnages humains sont exagérément grands pour donner son charme et son identité particulière au film, mais ils sont assez proportionnés pour être crédibles. Les sourcils, dont on pourrait détailler chaque poil, les cils dont l’ombre n’est jamais négligée, et les iris soignés donnent vie aux personnages comme jamais auparavant. Et les bouches ne sont pas en reste. Des rictus parfois à peine perceptibles changent complètement la donne.
Et les animaux… La caméléon Pascal (affublé d’un nom un peu WTF quand même pour une bestiole de dessin animé) ne dit jamais rien, mais il a une palette d’expressions et d’émotions assez impressionnante. Et même avec trois « doigts » seulement à chaque patte, il réussit l’exploit de parler avec les mains ! On salue le génie des chargés d’animation.

 

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3. Maximus, le cheval
Ce cheval est un sketch à lui tout seul. Il est responsable de la moitié des fous rires du film. Le comportement d’un chien, têtu comme une mule, et vexé comme un pou, on le trouve sous-exploité tellement il est drôle. Et là encore, l’expressivité réussit le dosage parfait entre l’être humain et le toon.

 

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4. Le chérubin alcoolique

Ce personnage est le truc le plus WTF jamais pondu par Disney. Je ne vois que trois explications à son existence : un pari perdu par le producteur, une lubie pondue par le DA un soir de beuverie très avancée, ou un excès de substances illicites pendant les réunions.

Quoi qu’il en soit, RIEN QUE POUR LUI, il faut voir Raiponce. C’est obligé.

Je vous parie ma petite culotte qu’il va devenir culte. (Cherchez pas, les garçons, ça ne veut rien dire.)

(D’ailleurs pas d’image, ce serait trop bête de vous gâcher la surprise. Je vous jure qu’il faut le voir pour le croire.)

 

5. La MILF

La marâtre a été conçue par des connaisseurs. Crinière de lionne, visage harmonieux tout en ayant du caractère, des yeux magnifiques, et des boobs…

Je ne sais pas comment l’exprimer autrement que comme ceci : la Môman de Raiponce, elle est bonne.

(Désolée.)

 

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6. Des clichés dézingués

Un chérubin alcoolique qui cherche tout le temps à pécho, une princesse avec du caractère, un bellâtre qui a conscience de l’être et qui en joue tout en sachant qu’il ne faut pas, les brigants qui… Je ne spoilerai pas. Mais un certain nombre de stéréotypes et de clichés particulièrement grossiers et présents dans les Disney sont utilisés pour être montrés du doigt. Mais sans aspect moralisateur. Moi je dis, bravo.

 

 

 

7. Un dessin animé ancré dans son époque

Ce qui m’a notamment plu dans les excellents Aladdin et Hercule (oui, bah, j’en démords pas, hein), c’était d’être ancrés dans leurs époques respectives. Dans les années 90, nous étions en plein boom des talk shows, que ce soit aux USA ou en France. Le génie d’Aladdin, dans ses délires, utilise beaucoup de références aux talk shows.

Hercule est sorti en 1997, année de la sortie de Titanic et de la folie DiCaprio auprès d’un public jeune et féminin, et période des boys band. Beaucoup de références à l’hystérie des jeunes filles, aux produits dérivés marketing à l’effigie d’un beau gosse, etc…

Raiponce est dans la même lignée sociologico-cinématographique. Cette fois-ci, c’est la « psychologisation » à tout va qui est critiquée, de l’éducation des enfants à l’analyse des rapports conflictuels entre individus. Et c’est drôle. Immensément drôle.

8. Les références

Un Disney sans références n’est pas un bon Disney. Celui-là n’échappe pas à la règle, et son succès est dû à ses nombreuses références : cinématographiques (Mission ImpossibleLes chimpanzés de l’espace, etc…), architecturale (le Mont-Saint-Michel), artistique (le mime Marceau), de la culture geek (la collection de licornes), etc…

Il y en a pour tous les goûts et pour toutes les cultures, des moins riches aux plus érudits. Un vrai bonheur.

9. Une palette complète d’émotions
Un bon Disney fait passer du rire aux larmes. Ca a été le cas ici, en ce qui me concerne. Des fous rires incontrôlables, des éclats de rire généreux, des yeux humides, des frissons, des envies d’aimer la terre entière, de l’euphorie… Je suis passée par tous les états en l’espace d’1h40, et c’est juste bon.

 

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10. Pour tous publics

Les filles, les garçons, les petits, les grands… Ce film peut parler à absolument tous les publics tellement il est riche d’émotions diverses, de références, de personnages différents, de situations et d’émotions universelles… Des lenteurs et des chansons qui mettront en émoi les petites filles, des scènes romantiques qui donnent des frissons aux célibattantes les plus indécrottables, des courses-poursuites et des situations héroïquent dont rêvent tous les petits garçons, un humour et des références à la culture masculine qui raviront les hommes…

Tout le monde trouvera son compte dans Raiponce.

Courez-y.

Courez voir aussi la réponse de mon ami @trollator, qui livre dans « 10 bonnes raisons de ne pas aller voir Raiponce » un argumentaire serré et souvent drôle (mais avec une réflexion fort intéressante sur le fond) en trollréponse à ma critique. Je m’octroierais bien un droit de Raiponce réponse mais malheureusement ce serait sans fin. Merci à lui pour cet autre point de vue, fort instructif et enrichissant !

 

[MUSIQUE] Les chiens en chansons

Je ne suis pas très « chien ». En fait, je déteste ces sales bêtes bruyantes qui puent complètement assistées. Je suis plus « chat ». Parce que les chats, c’est KRO MIGNON.

Mais on s’en fout. J’ai quand même eu envie de répertorier quelques chansons qui traitent du « meilleur ami de l’homme ». (Perso on m’a pas demandé mon avis avant de pondre cette expression débile, mais c’est peut-être aussi parce que j’ai pas de zizi. Allez savoir.)

Comme je suis une fille ouverte (comprenez : qui s’intéresse à tout – bande de pervers) et qui sait oublier sa mauvaise foi légendaire, il faut bien avouer que des chansons sur les chiens, y a quelques-unes qui me plaisent, et pour des raisons diverses.

LA PLUS MIGNONNE

Henri Dès, c’est l’idole de mon enfance. (Même que j’ai été tout émotionnée quand je l’ai eu au téléphone il y a quelques mois pour une interview ma foi fort intéressante.)

Et Henri Dès, bah il a fait une chanson trop mignonne sur un chien moche qui pue bruyant toussa toussa mais qu’il aime-euh ! quand même-euh ! Et voilà voilà.

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LA PLUS DRÔLE

Attention. Âmes sensibles, s’abstenir quand même. Oldelaf et Monsieur D. nous raconte à quel point Raoul le pitbull est bon chien-chien, mais qui a un peu tendance à bouffer tout le monde quand même. C’est horrible, c’est affreux, c’est très humour noir, et c’est tellement pour ça que c’est bon.

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LA PLUS CONNUE

Z’avez pas vu Mirza ? Non ? NON ??… Ah… ah bon. Bon ben tant pis, alors. Mais depuis le temps qu’elle tourne sur les ondes, cette chanson de Nino Ferrer, il aurait quand même dû le retrouver.

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LA MIEUX ECRITE

C’est un petit bijou, et c’est signé Georges Brassens. Y a pas de secret. Interprétée par Maxime Le Forestier qui excelle dans l’exercice des « nouvelles » du regretté chanteur, elle est malheureusement bien mal connue. Je vous conseille tout le reste de l’album, y a rien à jeter.

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LA PLUS A DOUBLE-SENS

Encore un texte magistralement écrit ! Une métophore filée entre un chien et un homme… Lynda Lemay réussit l’exploit de nous offrir une histoire à double-sens qui est aussi crédible quand on s’imagine le chien ou quand on s’imagine l’homme. Encore un tour de force. Bah moi je dis : bravo, et respect.

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J’espère que cette petite sélection vous aura plue / fait rire / touchée / découvrir de jolies nouveautés. N’hésitez pas à partager vos coups de coeur sur nos amis les iench en commentaire.

Oh, et si vous aimez ces vilaines bestioles et que vous habitez à Paris, je vous conseille le spectacle « Chienne » d’Alexandre Bonstein (voir lien intégré ci-avant), qui n’a rien de NSFW (quoi que, faut voir) mais qui est une comédie musicale qui traite d’un caniche royal femelle qui s’ennuie attachée à un arbre et qui se met donc à réfléchir. Ca dure une heure, dont trois heures de fous rires garantis.

Wouf !!

[MUSIQUE] Le Mur de Berlin en chansons

Un jour, Pôpa est rentré à la maison en claquant très fort la porte du bas, ce qui a fait trembler les murs et résonner très fort dans le hall d’entrée. Si j’étais habituée à ce que cette porte en fer prenne trop d’élan pour se refermer, j’ai commencé à m’inquiéter quand je l’ai entendu monter les marches quatre à quatre et ouvrir la porte de l’appartement à la volée.

« Le mur est tombé !!! », s’est-il écrié.

Je vous avoue que j’ai eu peur. Je pensais que le mur d’en bas s’était écroulé, et que l’appartement, où nous étions tous, allait suivre.

Heureusement, il ne s’agissait pas du mur de l’école où nous habitions. Mais bien du Mur de Berlin. C’était le 9 novembre 1989. J’avais 6 ans.

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Comme je n’avais pas vraiment l’âge de comprendre toutes les subtilités de cette page de l’Histoire qui se tournait (et même si, exceptionnellement, nous avions eu le droit de regarder les infos), Pôpa a profité de ma midinette-attitude pour Patriiiiick Bruel quelques années plus tard pour m’expliquer, via sa chanson sur le sujet, l’évènement en question.

J’ai trouvé cette méthode bien plus agréable, digeste, et compréhensible que les cours d’Histoire du lycée. C’est pour ça que pour le 21ème anniversaire de la Chute du Mur, j’ai voulu répertorier les chansons sur le sujet, pour comprendre l’Histoire via des histoires en musique.

(La liste est certainement non-exhaustive. N’hésitez pas à me dire en commentaire les chansons que je n’aurais pas trouvées…)

COMBIEN DE MURS

Celle-ci reste ma préférée. Si Patrick Bruel a beaucoup été tourné en dérision, il reste un compositeur et un parolier de talent. Cette chanson me fout les poils à chaque fois, et je regrette qu’elle soit si peu connue…

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WIND OF CHANGE

L’incontournable. C’est en quelque sorte l’hymne de la réunification et de la fin du Rideau de Fer. D’ailleurs, c’est la chanson la plus vendue en Allemagne de tous les temps.

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BERLIN CE JOUR-LA

Salvatore Adamo fera toujours du Salvatore Adamo. Médolie et instrumentation typique des années 80, avec des rimes faciles et une intrigue simple : deux amoureux sont enfin réunis puisque le Mur est tombé. Ce serait risible et fleur bleue si de telles situations n’avaient pas réellement existé…

MAUER

Chantée en Allemand par une femme, cette chanson de Sébastien Tellier raconte l’histoire d’une joueuse de tennis triste, parce qu’elle avait pris l’habitude de jouer en solitaire contre le Mur.

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L’AUTRE COTE

Yves Duteil est fidèle à lui-même dans les arrangements : grandes envolées lyriques d’instruments (très efficaces), et un texte à la fois très mélodieux et proche des gens. Il y raconte la construction du Mur, sa chute, et ouvre sur d’autres murs physiques ou symboliques.

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LES AVENTURES DE SIMON ET GÜNTHER STEIN

Cette chanson de Daniel Balavoine ne présente pas un grand intérêt, ni musical ni au niveau de l’histoire. Il s’agit de deux frères allemands, Simon et Günther, à deux époques de leur vie, en 1941 pendant la guerre, et en 1961 à la construction du Mur.

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A GREAT DAY FOR FREEDOM

Une magnifique et dernière chanson sur le sujet, par Pink Floyd.

[SPECTACLE] « Chienne » : comédie musicale incisive et canine d’Alexandre Bonstein

Rares sont les personnes dont je tombe folle amoureuse professionnellement parlant. Alexandre Bonstein fait partie de celles-là. Je resterai toujours béate d’admiration devant son génie artistique (et un peu jalouse aussi, huhu) et si je vous dis ça, c’est par honnêteté vis-à-vis de vous : ma critique de son dernier spectacle sera encore plus subjective qu’une critique digne de ce nom. Ceci étant précisé, je vais tout de même essayer d’être constructive.

« Chienne » est une comédie musicale dont le postulat de départ est simple : un caniche femelle, lauréate d’un prix de beauté pour chien, est attaché à un arbre dans la rue en attendant que son maître, parti faire quelques courses, revienne. Que se passe-t-il dans la tête d’un toutou pendant ces moments-là ?…

Et c’est là que la folie douce d’Alexandre Bonstein intervient. La chanson d’ouverture résume mieux que soixante critiques l’esprit du spectacle. Un extrait du texte, parce que c’est vous, et je vous laisse apprécier cet hymne en intégralité ci-dessous : « Le Poil est fait pour la caresse, pour qu’on y perde avec ivresse ses griffes dans sa jungle épaisse, le Poil mérite qu’on le connaisse… »

LE POIL (Alexandre Bonstein) – Interprète : Isabelle Ferron

Voilà voilà voilà. Du grand Alexandre Bonstein, vous dis-je. (Pour les plus observateurs d’entre vous, vous l’aurez reconnu dans la vidéo, déguisé en animal, à côté du pianiste Patrick Laviosa pour les choeurs.)

Mais attention, ceci n’est pas un extrait du spectacle. Il faut, bien entendu, s’imaginer Isabelle Ferron costumée en caniche. Ce qui donne ceci :

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Isabelle Ferron (Lady Capulet dans le Roméo et Juliette de Gérard Presgurvic, notamment) campe donc cette « fifille » tour à tour angoissée, frétillante, orgueilleuse, philosophe et canico-sociologue (oui, je l’invente). Elle nous livre un grand numéro de comédienne, avec une palette de couleurs qui va de l’adolescente débile à la reine de beauté vieillissante, en passant par la coquine et la diva. Elle réussit à nous faire piquer des fous rires incontrôlables, pour, l’instant d’après, nous raidir sur notre siège et nous faire dresser les… poils. Sa voix est impeccablement maîtrisée sur le plan technique, et la qualité du texte lui permet de s’amuser dans les divers registres qui lui sont offert.

Cela dit, on peut regretter que la mise en scène d’Alexandre Bonstein ne l’autorise pas à se déplacer plus souvent : certes, elle joue le rôle d’une chienne attachée à un arbre mais la convention théâtrale pourrait très bien la dispenser de laisse. On a l’impression qu’elle est frustrée d’être aussi peu mobile dans l’espace – et si la frustration peut se concevoir pour le personnage, c’est plus dommage quand on la ressent de la chanteuse-comédienne. Le public préfèrerait aussi la voir gambader comme on le lui autorise dans de trop rares numéros « libérés ».

Mais elle n’est pas seule sur scène. Deux musiciens à l’air joyeusement cabot (Jérôme Lifszyc et Thomas Suire) l’accompagnent, tour à tour aux instruments (dont quelques-uns étranges, j’irai me renseigner pour vous), aux accessoires, au décor, à la réplique qui fait wouche ou aux choeurs admirablement déjantés. Ils ont l’air bête, ils ont des visages de toons et on voudrait qu’ils interagissent un peu plus souvent.

Chienne_VingtiemeTheatre.jpgDerrière la légèreté du propos de départ, Alexandre Bonstein réussit tout de même l’exploit de rendre intéressant et scientifique une étude sociologique poussée sur le pipi et les étrons canins (il faut aller le voir pour le croire), et fait passer une critique assez caustique des petits travers de notre société contemporaine. Que ce soit à travers des jeux de lumière, des accessoires loufoques, ou des gestuelles  ridicules empruntées aux pseudo-chanteurs de télé-réalité, il dénonce avec humour (et en vrac) la tendance des jeunes voix françaises aux vibes à outrance, la dictature de la minceur, l’hypocrisie des pseudos sur les sites de rencontre, et la variété française bas de gamme.

Finalement, cette chienne amoureuse de son maître s’avère très perspicace dans son analyse de la société humaine, et son oeil extérieur décomplexé nous renvoit à notre volonté désespéré de plaire. Et tout ça avec un fou rire toutes les deux minutes.

Parce qu’Alexandre Bonstein, c’est ça : entre Tex Avery et les Monthy Python, des situations imaginées par un esprit rétrogradé au stade anal sans pour autant s’être départi d’un oeil tendrement critique, et des textes ciselés entre vraie poésie et fausse légèreté. Le tout servi par une comédienne survoltée et deux musiciens sortis tout droit d’une bande-dessinée.

« Chienne », ça ferait glousser Droopy, ça illuminerait l’oeil de Rantanplan, ça donnerait du caractère à Milou, et c’est surtout drôle, intelligent et visuellement et musicalement riche pour nous autres humains.

Bref… toutou pour plaire !

Et je vais pas faire ma chienne, voici un autre extrait du spectacle. « Naturelle comme le soleil, comme les chevaux, comme les produits qu’on appelle bio ». (Attention, RISQUE DE DEPENDANCE AUX CHANSONS PRESENTEES DANS CET ARTICLE.)

En fait, Alexandre Bonstein, il est déprimant (c’est la jalouse en moi qui parle). Non seulement c’est un génie de la scène française (je fais régulièrement des crises de manque de Créatures), mais en plus ses spectacles sont comme du bon vin (pour ceux qui me connaissent, partez du principe que j’aime ça, hein) : ils s’améliorent toujours avec le temps. Et finalement, c’est à ça qu’on reconnaît un spectacle vivant de qualité : il n’est pas figé, il évolue, il trouve d’autres choses, il n’arrive jamais à maturité tout en restant au sommet de son art.

Merci, Alexandre. Et avoir travaillé avec toi reste ma plus grande fierté et mon plus grand honneur d’artiste.

Je suis intimement convaincue que tu deviendras culte…

(Chers lecteurs, faites-moi penser quand je l’interviewerai à lui demander ce qu’il a exactement contre Pina Bausch et contre les gnous. Et contre les labradors.)

Faites pas vos cabots, c’est au Vingtième Théâtre du mercredi au samedi à 20 heures (y a un spectacle après, donc attention, ça commence à 20 heures pétantes !!). Plein tarif 24€, seniors et habitants du XXème 19€, étudiants 12€. Location 01 43 66 01 13.

Il y a bien sûr le site officiel et la page Facebook.

[MUSIQUE] Coups de coeur Jazz : Musica Nuda et The Puppini Sisters

J’ai des goûts musicaux que certainement beaucoup d’entre vous qualifieraient « de chiotte ». Oui, j’aime la bonne grosse variété qui tache. Plus la mélodie est simple et efficace, plus ça me plaît. La pop a été comme inventée pour moi et je suis en général d’accord avec les gros succès des charts. Mes idoles s’appellent Jean-Jacques Goldman, Lynda Lemay, Michael Jackson, Lady Gaga et Britney Spears. J’adore le premier album de Carla Bruni, j’écoute avec plaisir du Michel Sardou et du Céline Dion dans mon iPod, la radio de mon adolescence était Nostalgie et je me branche régulièrement sur Chérie FM. Tout cela ne m’empêche pas, en revanche, d’être allergique à Christophe Maé.

J’aime aussi beaucoup de petits groupes plus au moins médiatiques comme Oldelaf et Monsieur D., La Chanson du Dimanche et l’excellentissime Barcella. J’écoute énormément de musique classique et baroque, je me délecte de musique médiévale, je passe aisément de Daft Punk à Henri Dès en passant par Notre-Dame de Paris et Scorpions, je ne renierai aucun des cinq concerts de Patrick Bruel auxquels j’ai assisté et je me refais régulièrement l’intégrale des Spice Girls.

Autant vous dire que le jazz, c’est pas mon truc. Mais c’est pas mon truc genre réaction épidermique quand j’entends un saxophone baver, hein. En fait, ça me provoque des crises de nerfs – c’est véridique et ça n’a rien d’amusant. Je ne supporte physiquement pas le jazz pur et dur et je fuis donc tout ce qui peut avoir une consonnance jazzy.

Mais j’ai récemment fait deux découvertes qui pourraient bien entrer dans la catégorie « jazz ». Deux petits bijoux qui sont parvenus totalement par hasard à mes oreilles éblouies. Deux groupes complètement différents l’un de l’autre, mais qui mettent tous deux l’accent sur les voix, et non l’instrumentation, à travers des reprises de chansons venues de répertoires variés.

Musica Nuda

Comme son nom l’indique, Musica Nuda conçoit la musique comme quelque chose de très dépouillé, de lesté de toutes sortes d’artifices souvent inutiles, pour arriver à un résultat minimaliste, où la nudité de la voix de Petra Nagoni révèle la force d’une interprétation à travers la sensibilité d’un timbre d’une pureté étonnante. La contrebasse de Ferruccio Spinetti l’accompagne, parfois à peine dans le pincement d’une corde à point nommé, parfois pour la soutenir dans ce qui semble être une improvisation, parfois  s’émancipant dans une minute de gloire grandement méritée.

Ces deux musiciens italiens nous offrent en tout cas tout un éventail de reprises, des Beatles à Police en passant par B.J. Thomas. Cette voix et cette contrebasse peuvent tout reprendre, dans des versions à la fois universelles et très personnelles. La technique de Petra Nagoni nous entraîne vers des sommets rarement atteints, comme ce mi qu’elle tient à la fin de Guarda Che Luna, et la discrétion tranquille de Ferruccio Spinetti rendent l’unique instrument aussi indispensable qu’inattendu.

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The Puppini Sisters

Les Puppini Sisters sont beaucoup plus accompagnées : leurs reprises ont une sonorité très années 40, d’une pop rétro et kitch. Leur particularité est d’être composées de trois voix féminines utilisant la technique Close Harmony, pour des interprétations complètement différentes que peuvent faire Musica Nuda, mais tout aussi réussies – dans un autre style. Elles pourraient aisément se contenter de faire de l’a cappella, mais il faut bien avouer que les arrangements de leur album « Betcha Bottom Dollar » sont délicieusement jouissifs et enlevés. Les trois chanteuses britanniques, respectivement brune, rousse, et blonde, s’amusent, et ça s’entend. Leurs harmonies donnent aux chansons, souvent ultra-célèbres, une couleur que l’on n’aurait jamais soupçonnée. On redécouvre des standards paradoxalement dépoussiérés par trois chanteuses qui puisent leur inspiration dans le style des années 40. Et pour l’anecdote, Marcella Puppini a eu l’idée de former ce groupe après avoir vu Les Triplettes de Belleville. Soyons chauvins.

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La raison pour laquelle j’ai voulu faire un seul billet de ces deux découvertes, c’est parce qu’elles ont réussi à me faire aimer une chanson que mes goûts naturels auraient dû ne pas me faire détester. Si je vous dis Gloria Gaynor ?… Oui, Musica Nuda et les Puppini Sisters ont réussi l’exploit de rendre I Will Survive absolument délicieuse, chacun dans leur style. Je vous laisse découvrir les deux versions, jolies illustrations de ce que peuvent faire deux groupes différents d’une seule et même superstar de la chanson, trop écoutée, trop entendue et dont on n’attend plus rien. Sauf si…

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[SPECTACLE] Les Voca People : des Tic-Tac et des notes

Il y a de cela plusieurs mois, j’ai découvert au hasard de ma procrastination chronique cette stupéfiante performance de huit drôles de phénomènes tout de blanc vêtus.

 

 

 

Ils s’appellent les Voca People, ils sont Israëliens, et ils se nomment respectivement Beat On, Scratcher, Tubas, Tenoro, Bari-ton, Alta, Mezzo, et Soprana – de leur spécialités respectives.

Moi qui suis ultra-sensible aux voix, je reste scotchée devant les performances qu’ils livrent. A côté d’eux, Powwow – ma référence a capella jusqu’à présent – apparaissent comme des petits joueurs. Cinq chanteurs et trois « musiciens », ils reprennent les plus grands tubes internationaux sans rien d’autre que leurs huit paires de cordes vocales. Et c’est bluffant.

 

 

 

 

Vous avez sûrement pu les découvrir dans les pubs Tic-Tac qui les sponsorisent (je précise que ce billet, lui, est non-sponsorisé).

 

 

 

Ils seront en concert à Bobino du 18 janvier au 20 mars prochain, et croyez-moi, j’irai les voir plutôt huit fois qu’une !!

Ils sont également sur Facebook et sur Twitter, où ils ont réussi à inventer un nouveau système de signes pour se faire comprendre dans toutes les langues. Même le packaging est impeccable. Des extra-terrestres pareils, on ne peut pas ne pas vouloir les rencontrer.

[NECRO/CINEMA] Rohmer et Endemol : même (pitoyable) combat

Le cinéaste Éric Rohmer est mort. Il laisse derrière lui une filmographie basée en grande partie sur les comportements amoureux, la comédie sociale et des jeunes femmes pas toujours très habillées. Finalement, Endemol France n’a rien inventé.

La Nouvelle Vague a rendu un de ses derniers souffles. Éric Rohmer, 89 ans, est décédé le 11 janvier 2010, endeuillant le cinéma français. Ou tout du moins… un certain cinéma français : celui de l’élite, celui des lettrés, celui de la bourgeoisie. Rohmer n’était pas un réalisateur très populaire. Et pourtant, à y regarder de plus près, une grande partie de ses films repose sur des ficelles qui font les choux gras des producteurs de téléréalité depuis de nombreuses années.

A première vue, nombre de ses films se rapprochent plus des séries de AB Productions que de Loft Story : intrigues amoureuses au ras des pâquerettes, répliques à la chaîne, mise en scène de carton-pâte et comédiens sonnant aussi faux que dans un doublage raté d’une publicité étrangère. Même André Dussollier dans le Beau mariage (1982) et Féodor Atkine dans Pauline à la plage (1982) ne trouvent pas le ton juste. Car Éric Rohmer avait beau écrire seul le scénario de films qu’il réalisait lui-même, il était un bien piètre directeur d’acteurs. Il l’avouait d’ailleurs bien volontiers : « Je ne pense pas que, pour moi, la direction d’acteur existe sur le tournage. Si jamais elle existe, c’est dans les conversations que je peux avoir avec les acteurs avant les films. (…) Effectivement, en général, je ne demande rien aux acteurs ».

Éric Rohmer, c’était donc la Voix de Secret Story avant l’heure. Il veillait paternellement au bon déroulé de l’action, mais ses indications, quand il y en avait, étaient trop générales : « Dites votre texte, en ne restant pas plantés comme des piquets, mais en bougeant. » On ne dirige pas des dialogues trop écrits comme on influence une improvisation. Sans repères, les acteurs ne pouvaient qu’être faux, comme Jean-Louis Trintignant dans Ma nuit chez Maud (1969) qui demande « un Vittel » sur le même ton qu’il dit : « Bon, j’irai rien que pour te démentir. » De la fausseté du ton ou de la platitude du dialogue, difficile de dire laquelle est la plus risible.

Le Rayon vert (1986) est peut-être l’exception : reposant en grande partie sur l’improvisation, la non-méthode du réalisateur s’avère efficace et flatte l’oreille du spectateur. Sauf qu’un film juste sur vingt-cinq longs-métrages qui sonnent terriblement faux, c’est peu. Dans Secret Story, au moins, les candidats sont naturels, le public n’a pas l’impression d’être floué. Il n’y aura eu que les critiques pour crier au génie. Ceux des Cahiers du Cinéma, notamment, où Éric Rohmer – de son vrai nom Maurice Schérer – aura été rédacteur en chef de 1957 à 1963.

Comme par hasard.

Les films d’Éric Rohmer avaient une autre constante : leurs thématiques. Rien d’original même dans les années 60, Molière et Marivaux les avaient traitées bien avant lui : les sentiments amoureux, l’amitié entre un homme et une femme, la séduction, l’infidélité, le mariage, les rapports entre les âges, entre les classes… Et la téléréalité, aujourd’hui, reprend exactement les mêmes ingrédients pour un succès populaire qui n’est plus à prouver : prenez des personnages stéréotypés en nombre restreint, mettez-les dans un endroit plus au moins clos, installez des caméras, donnez un nom évocateur au programme, remuez le tout… Vous aurez des jolies filles en bikini, des bellâtres séducteurs, des complots amoureux, des flirts, des jalousies, des disputes, des bagarres, des séparations, des stratégies, des espionnages, voire de l’érotisme flirtant avec de la pornographie.

Qu’est-ce qui différencie le cinéma d’auteur de Rohmer de la plus vulgaire émission de téléréalité, alors ? Pas grand-chose, finalement. Prenez les titres : Ma nuit chez MaudLa CollectionneusePauline à la plageL’Amour l’après-midiL’amie de mon amieQuatre Aventures de Reinette et MirabelleL’Anglaise et le DucLes Amours d’Astrée et de Céladon… Marc Dorcel fait à peine moins subtil. Quant à Loft StoryL’Île de la TentationL’Amour est dans le préDilemme ou Trompe-moi si tu peux, ils n’ont rien à leur envier.

Le rapport au corps des femmes, ensuite. Éric Rohmer disait : « J’ai fait dire, hors champ, le texte de ce passage, pour qu’on n’ait pas l’impression que c’est le metteur en scène qui s’était payé le plaisir de déshabiller ses actrices ». Certainement vrai pour Les amours d’Astrée et de Céladon (2007), mais pas pour Pauline à la plage où Arielle Dombasle descend un escalier en même temps qu’elle descend un T-shirt sur ses seins nus. Inutile. On aurait compris qu’elle sortait du lit même en finissant seulement d’enfiler ce T-shirt. On en se recoiffant. Bref, il y avait d’autres mises en scène possibles. Au moins, les candidates des émissions de téléréalité ont la décence de rester habillées. Alors qu’il n’est pas rare chez Rohmer de voir des femmes en tenue d’Eve.

Les thématiques la plus présente dans les deux formats restent quand même les relations entre les hommes et les femmes et le spectacle de leur intimité. Il y a des complots dans les deux cas : une scénarisation est prévue, que ce soit par le biais d’un personnage ou de la production, il y a des phases d’observation, des épreuves, des tests, des coups en douce, des échecs, des remises en question… Les ficelles sont les mêmes, les formats diffèrent.

Pourquoi Rohmer a-t-il alors eu un succès si limité ? Les personnages peuvent être mis en cause : ils sont très peu attachants. Outre leur jeu médiocre, les acteurs n’ont jamais qu’une seule expression tout au long d’un film. Fabrice Luchini, par exemple, a l’air ahuri du début jusqu’à la fin de Perceval le Gallois (1978), Arielle Dombasle est la romantique évaporée de Pauline à la plage, quant à Jean-Louis Trintignant dansMa nuit chez Maud et Jean-Claude Brialy dans Le genou de Claire (1970), ils sont neutres, inexpressifs, les mêmes en toute circonstance. Ces personnages manquent cruellement d’âme et les dialogues, trop littéraires, ne les aident pas à les humaniser. Le spectateur peine à s’identifier.

La temporalité, également. Les films de Rohmer sont ennuyeux. Le rythme est lent, le montage ne fait jamais ressortir d’accélération du récit, le scénario est toujours linéaire. Les intrigues, téléphonées, se devinent à l’avance : dès les premières minutes de Ma nuit chez Maud, on sait que Jean-Louis Trintignant épousera Marie-Christine Barrault après une aventure avec Françoise Fabian. Quel intérêt ?… Le réalisateur perd un temps fou en dialogues aussi plats qu’inutiles, comme dans Pauline à la plage : « Toi, Pierre, raccompagne-le » « Ramène-le plutôt. » « C’est à côté de chez toi, c’est plus simple que ça soit toi, je raccompagnerai Pauline quand elle sera calmée. » « C’est moi qui l’ai amenée, c’est moi qui la ramènerai. » « Pierre, sois pas grotesque. » « Pierre, tu peux ramener Sylvain s’il te plaît ? Son père va l’attraper, Henri me ramènera, ça ne t’ennuie pas ? » etc… Ces répliques d’une banalité navrante ne servent ni l’histoire, ni les personnages. Et plombent le rythme. Le critique Serge Daney a d’ailleurs dit :« Rohmer invente des durées ». Certes. Mais trop de durées tuent la durée : à force de créer son temps, il finit par nous faire perdre le nôtre.

Outre l’ennui, les personnages désincarnés, peu sympathiques et bourgeois se regardant le nombril, qui font fuir un public avide d’identification (au moins, les personnages d’AB Production ou les candidats des émissions d’Endemol leur ressemblent), reste chez Rohmer cette ambiguïté des fantasmes du réalisateur. Des titres explicites, des intrigues coquines, des femmes nues, un fétichisme du détail (le genou de Claire, les pieds de Pauline, les fines attaches de L’amie de mon amie, etc…) et… une perversité certaine.

Dans Pauline à la plage par exemple, Pauline est interprétée par une adolescente à peine formée. Ce qui n’empêche pas Arielle Dombasle d’insister auprès de Pascal Greggory pour qu’il la séduise. Ou Féodor Atkine de lui dire « Je suis un homme, t’es une femme, t’as de jolies jambes » après l’avoir caressée alors qu’elle dormait. Ou de la filmer en bikini laissant très clairement apercevoir le haut de ses fesses. C’est dérangeant.

Plus malsain encore était Le genou de Claire. Jérôme, homme fiancé d’une trentaine d’années, séduit d’abord Laura, qu’il va jusqu’à embrasser, puis Claire, dont il caresse le genou dans une séquence très érotique. Sauf que Laura et Claire sont toutes deux mineures. Et Jérôme ira jusqu’à dire à propos de Claire : « Le trouble qu’elle provoque en moi me donne un droit sur elle. » C’est extrêmement choquant : c’est l’excuse de tout violeur et de tout pédophile.

Si Laura et Claire sont des nymphettes, n’est pas Nabokov qui veut. Humbert Humbert était amoureux de Lolita – Jérôme joue, avec ces adolescentes, il tente une expérience soufflée par une amie. Rohmer sert-il dans ces deux films un autre propos que les fantasmes libidineux d’un réalisateur ? Si tel est le cas, ce n’est ni très clair, ni très adroit. Alors certes, autre temps, autres mœurs. Là encore, cette excuse n’en est pas une : c’est celle des défenseurs de Roman Polanski.

Éric Rohmer nous a quittés. Si la mort de l’être cher est épouvantable, le décès du réalisateur ne doit pas empêcher de remettre son œuvre en question dans un contexte actuel : que nous laisse-t-il ? La complaisance des critiques petit-bourgeois et parisianistes envers un réalisateur qui leur ressemblait – et qui avait été leur confrère – n’a aucune valeur. Les spectateurs, même à l’époque, le savaient bien : les critiques n’étaient élogieux que dans un cercle restreint d’amis et d’intérêts.

Le cinéma de Rohmer restera élitiste et froid, ennuyeux et plat, et n’aura pas pu, malgré les ingrédients utilisés dans les émissions de téléréalité d’aujourd’hui, conquérir un public nombreux. Ces programmes au moins, tout critiquables qu’ils sont, annoncent tout de suite leur couleur. Les films de Rohmer eux, sont hypocrites et tendancieux. Sous leur aspect lisse et moralisateur, des fantasmes peu reluisants font surface. Les critiques s’extasient, toujours avides de sensations à la limite des bonnes mœurs et de la légalité sous couvert d’expression artistique. Le public, lui, n’est pas dupe.

Tous les propos rapportés dans cet article sont tirés de l’interview du 12 juillet 2007 pour Allociné.

[SPECTACLE] Des Justes en quête de sens

Les Justes, d’Albert Camus, sont mis en scène par un Stanislas Nordey inspiré mais maladroit. Quelques comédiens remarquables sauvent ce spectacle aux longueurs répétées. Pas inintéressant, mais hélas inabouti.

Les Justes, c’est l’histoire de cinq révolutionnaires russes au début du XXème siècle. Quatre hommes et une femme, décidés à assassiner le grand-duc Serge pour sauver le peuple russe de la misère et pour faire triompher la justice. Leurs convictions, aussi nobles soient-elles, excusent-elles pour autant leur acte terroriste ?

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Une mise en scène minimaliste d’un texte difficile

Cette pièce de Camus a des échos particulièrement actuels plus d’un siècle après l’action inspirée d’une histoire vraie. L’austérité de la mise en scène de Stanislas Nordey rejoint celle du texte pour un rendu pesant, mais malgré tout de grande qualité. Le décor et les déplacements des comédiens, minimalistes et géométriques, servent la réflexion de l’auteur sans la polluer d’artifices. Le texte ainsi mis en exergue, les comédiens sont seuls maîtres à bord.

C’est là que le bât blesse. Le parti pris de la direction d’acteur est certes louable en théorie, mais discutable en pratique. Stanislas Nordey a voulu ne servir que le texte, et finalement, on finit par le perdre. En demandant à ses comédiens de le sur-articuler, c’est comme s’il nous imposait de le lire collé au visage. A le voir de trop près, on ne le voit plus du tout. On a besoin d’un minimum de recul pour qu’il nous apparaisse, et c’est ce recul-là que le metteur en scène nous refuse.

Des comédiens inégaux

Les comédiens, inégaux, le sont d’autant plus devant ces exigences : le charisme de Frédéric Leidgens (Boris) s’efface derrière sa diction plus qu’agaçante, quand elle n’en devient pas risible. Pourquoi diantre prononce-t-il le « e » muet à la fin des mots, et pour quelle raison obscure ses « r » sont-ils si durs et si appuyés ?

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Vincent Dissez (Ivan, ci-dessus) semble jouer à celui qui dira son texte en ouvrant le plus la bouche en hauteur et en largeur, et Damien Gabriac (Alexis) disparaît complètement derrière la monotonie synthétique de sa diction. Quant à Wajdi Mouawad (Stepan), malgré ses efforts pour se fondre dans un style qui n’est pas le sien, multiplie les erreurs de débutant que ne renierait pas une parodie des Inconnus.

Seule Emmanuelle Béart (Dora) tire son épingle du jeu. Rebelle, la comédienne prend la liberté de respecter la ponctuation, et ferme tous ses sens. Ses interventions sont autant de virgules d’oxygène dans un ensemble anxiogène et rendent audible un texte déjà très lourd. Sans oublier une mention spéciale pour Laurent Sauvage (Skouratov) : il réussit à faire rire un public pourtant assommé en déclamant du Camus comme un sketch de one-man-show. Brillant et salvateur.

La volonté de Stanislas Nordey de servir le texte est la preuve que ce metteur en scène souhaite amener les spectateurs à une réflexion qui irait au-delà de la pièce. Malheureusement, les comédiens, mal dirigés, s’écoutent dire leurs répliques, et le spectateur n’a d’autre choix que de tenter – en vain – d’en extraire le sens. Les plus téméraires tiendront une heure avant que l’ennui s’installe pour les deux petites heures restantes.

Dommage, car Emmanuelle Béart et Laurent Sauvage sont la preuve que ces Justes peuvent aussi être digestes, audibles, et matière à réflexion. Un spectacle maladroit, en somme, avec pourtant toutes les promesses avortées d’un metteur en scène de talent.

Florence Porcel

 

 

 

Les Justes, d’Albert Camus. Mise en scène de Stanislas Nordey. Avec Emmanuelle Béart, Vincent Dissez, , Damien Gabriac, Frédéric Leidgens, Wajdi Mouawad.

Du 27 au 30 avril 2010 au Théâtre des Treize Vents, Montpellier.

Du 4 au 6 mai 2010 à la Comédie de Clermont-Ferrand.

[TWITTER] To tweet or not to tweet ? (Initiation à Twitter)

J’aime Twitter, voilà, c’est dit. Je trouve que c’est un des meilleurs concepts jamais inventés pour le web. C’est tellement riche, tellement complexe, tellement humain, tellement enrichissant, et à la fois tellement simple… Mais je me suis rendu compte que Twitter pouvait  laisser indifférent « Ca sert à rien ! » ou pouvait faire peur « Ouh la la j’y comprends rien, c’est trop compliqué, ce truc ! ». Je vais donc essayer, dans ce post un peu long mais que je vais illustrer par des exemples, de vous expliquer les utilisations que l’on peut en faire et tout ce que ça peut apporter d’informations, de rencontres, et d’émotions. Initiation.

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Un peu d’histoire et de données chiffrées pour commencer… Twitter est un réseau social et un service de micro-blogging où les utilisateurs peuvent envoyer et lire des messages de 140 caractères maximum. Créé par l’américain Jack Dorsey en 2006, il compte aujourd’hui plus de 100 millions utilisateurs actifs partout dans le monde. Malheureusement, il est encore mal connu en France, bien que ce soit un outil très pratique et très drôle.

Pour ceux que ça intéresse, allez voir ici quelques chiffres-clés, et là des statistiques (sous forme de schémas !)

Twitter, en Anglais, veut dire « gazouiller » – d’où le petit oiseau bleu choisi comme mascotte. Il a été conçu pour papoter, donc. Mais Twitter est une entité qui doit vous choisir si vous voulez en faire partie (un peu comme l’Île de Lost, si vous voulez). Et la meilleure manière d’être choisi est de beaucoup « tweeter », c’est-à-dire d’écrire beaucoup de tweets tous les jours. Seuls les gens qui travaillent sur ordinateur toute la journée ou qui ont un Smartphone/iPhone/etc peuvent le faire. C’est une des raisons pour lesquelles la plupart des utilisateurs de Twitter sont des geeks, des professionnels de la communication et du marketing, et des journalistes.

Règle d’or : soyez intéressant !

Pour être choisi par Twitter, vous devez absolument être intéressant : ne papotez pas ! (Oui, je sais, je viens juste de dire le contraire. Mais ne croyez pas tout ce que je dis. Je papote beaucoup : je suis une fille, hein.)  

« Je suis en train de manger une pomme » n’est pas un tweet intéressant. Si vous voulez raconter votre vie, allez sur Facebook (ou écrivez un roman) (ou appelez votre meilleure amie) (ou contactez l’AFP si vous êtes Robert Pattinson).

Vous devez absolument apporter une information à chaque tweet : ça peut être un fait…

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… quelque chose d’amusant…

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… un jeu de mot…

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… une interprétation drôle d’un fait…

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… une idée…

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… une pensée…

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… etc… Vous pouvez tweeter n’importer quoi. Mais un n’importe quoi intéressant.

Un outil très simple d’utilisation (mais si)

Pour vous inscrire, rien de plus simple : il vous suffit de vos nom et prénom, d’une adresse mail, d’un nom d’utilisateur (pseudo), et d’un mot de passe. Une fois tout ça renseigné, votre compte est créé. Vous pouvez choisir d’avoir un compte privé ou un compte public. Si vous choisissez de ne pas protéger vos tweets (les comptes cadenassés sont plutôt mal vus), il faut savoir que Twitter est un espace public : n’importe qui avec un accès à Internet pourra lire vos tweets, qu’il ait un compte Twitter ou non.

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Une fois votre compte créé, vous pouvez écrire autant de tweets que vous voulez, et vous pouvez suivre autant de comptes que vous le souhaitez. Les personnes que l’on suit s’appellent lesabonnements (ou followings), et les personnes qui nous suivent s’appellent les abonnés (oufollowers). Si vous en avez marre de follower quelqu’un, il vous suffit de l’unfollower en un clic.

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Les gens que vous suivez ne sont pas obligés de vous suivre – et vous n’êtes pas obligé de suivre les gens qui vous suivent. C’est très simple. (Tout le monde suit bien ?)

Twitter a son langage propre

Une fois que vous êtes inscrit, il est important de s’approprier le langage utilisé exclusivement sur Twitter. Au début, on se sent un peu perdu mais c’est normal : pas d’inquiétude, il faut toujours un petit temps d’adaptation. 140 caractères pour un message, c’est très court, mais il y a deux règles à respecter absolument pour s’intégrer : ne surtout pas utiliser le langage SMS (rédhibitoire) et ne pas faire de fautes d’orthographe (ça pique les yeux, les Twittos détestent ça, et finiront par vous unfollower à force de vous corriger.) D’ailleurs, c’est peut-être une des raisons pour lesquelles Twitter est très peu utilisé par les jeunes, qui préfèrent Facebook où la censure orthographique n’existe pas.

Pas de langage SMS, donc – cependant, quelques abréviations sont acceptées et couramment utilisées. Par exemple : RT (retweet), TL (timeline – c’est l’ensemble des tweets que vous pouvez voir sur votre page), DM (direct message), IRL (in real life), OM(F)G (oh my (fucking) god), NSFW (not safe for work), OMW (on my way), WTF (what the fuck), etc… Toutes celles-ci (j’en oublie sûrement) sont utilisées sans cesse, et lire une timeline vous paraîtra aussi abscons que du javanais si vous n’en connaissez pas la signification.

Un outil interactif

Le but de Twitter n’est pas d’écrire ses 140 caractères tout seul dans son coin (même si c’est possible, hein). On peut parler aux autres personnes, interagir, donner son avis, etc. Pour ce faire, il existe un bouton « Répondre » en dessous de chaque tweet.

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Si on clique dessus, le tweet que l’on s’apprête à écrire commencera par le nom d’utilisateur (@+pseudo) du tweet répondu…

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… et on peut ensuite écrire ce qu’on a envie de lui dire.

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Quand un tweet commence par un nom d’utilisateur, il existe deux cas différents : si vos followers suivent cette personne aussi, ils verront votre réponse (pourtant adressée à ce seul utilisateur). En revanche, si vos followers ne suivent pas cette personne, ils ne verront pas ce tweet. En revanche, si quelqu’un qui ne vous suit pas, et qui n’a d’ailleurs pas forcément de compte Twitter, se rend sur votre profil, il pourra voir tous vos tweets, qu’ils s’adressent à quelqu’un en particulier ou non. C’est très simple. (Tout le monde suit bien ?)

Voilà un proverbe qui tombe à pic dans ma TL (timeline) au moment où je suis en train de vous parler :

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A noter que j’ai effacé l’avatar et le nom d’utilisateur de la personne, parce que son compte est privé : le petit cadenas juste avant le message l’indique.

Quand vous considérez qu’un tweet est amusant, intéressant, etc… et que vous voulez en faire profiter tous vos followers (ceux qui suivent votre compte, pour ceux qui ne suivent pas), vous pouvez le « retweeter ». Là encore, deux solutions s’offrent à vous : à côté du bouton « Répondre » en dessous de chaque tweet dans votre timeline, il y a le bouton « Retweeter ».

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Un simple clic, et le tweet retweeté se retrouve tel quel dans les timelines de vos followers.

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Mais il est également possible de retweeter manuellement : si le tweet retweeté fait moins de 140 caractères, ça permet d’y réagir. Pour le coup, il y a une marche à suivre : ce qu’on en pense + RT + @username + copié-collé du tweet retweeté. C’est très simple.

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C’est en retweetant des messages que certaines informations peuvent faire le tour du monde en quelques secondes. Twitter est un outil extrêmement puissant.

Partager des informations

Le principal intérêt de Twitter, ça reste de partager des informations. La plupart des tweets contiennent des liens vers des pages web, vers des vidéos, ou vers des photos. Pour les journalistes, Twitter est considéré comme une source de sources.

Une des utilisations les plus intéressantes de Twitter est le « live-tweet ». Live-tweet quelque chose, c’est le raconter en direct. Ca peut être très drôle (le live-tweet d’une émission ou d’un match de foot, par exemple), très pratique pour les journalistes (le live-tweet du procès de Dominique de Villepin, par exemple, rendu possible par un journaliste à l’intérieur du tribunal qui a pu live-tweeté les décisions de justice minute par minute), ou très instructif (des gens qui live-tweetent des manifestations dans des pays où les journalistes ne peuvent pas se rendre, des live-tweets de tremblements de terre, de cérémonies officielles ou d’évènements à l’autre bout du monde, etc…).

Hashtags bien-aimés

Les « hashtags » (# + mot ou expression sans utiliser d’espaces) sont absolument essentiels à une bonne utilisation de Twitter. On ne peut pas twitter si on ne maîtrise par le concept des hashtags. Par exemple, quand le journaliste de France 2 a live-tweeté le procès de Dominique de Villepin, il mettait le hashtag « #DDV » à la fin de chaque tweet pour bien indiquer que ce tweet parlait du procès.

N’importe quel mot ou n’importe quelle expression peut devenir un hashtag. Une fois qu’un hashtag est créé, il est possible de cliquer dessus et d’avoir la liste de tous les autres tweets l’utilisant.

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Quand quelque chose est live-tweeté, les utilisateurs de Twitter se mettent d’accord pour n’utiliser qu’un seul hashtag, et utilisent ensuite tous le même. Par exemple, pour Koh Lanta : on peut hashtaguer #kohlanta ou #KL. Si un seul est utilisé, c’est quand même plus simple de s’y retrouver !

Les hashtags ne sont pas seulement utilisés lors des live-tweets. Ils peuvent aussi indiquer une ironie, expliquer le message qui ne voudrait rien dire sans le hashtag, etc…

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Les hashtags les plus utilisés sont appelés « trending topics » (TT). Ils changent bien évidemment tous les jours en fonction de l’actualité, et ils sont au nombre de dix visibles sur la page d’accueil. Parmi les hashtags les plus populaires, on trouve #nowplaying, #fail, #wtf, etc…

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Vous avez pu voir, sur certains tweets, une petite étoile jaune à droite. Je l’ai cochée parce que je voulais garder ce tweet en favori : on peut ainsi archiver tous les tweets que l’on veut garder juste en cliquant sur la petite étoile. Pour les retrouver, il suffit d’aller dans la rubrique « Favoris » sur la page d’accueil, et ils s’affichent tous.

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Outre l’onglet « Favoris », il y a également « @username » : cliquez dessus, et vous aurez la liste de tous les tweets mentionnant votre nom. C’est très utile lorsqu’on ne s’est pas connecté depuis un moment : ça permet de savoir si on vous a parlé, ou si on vous a cité en votre absence. Et si l’on est connecté, ça permet de voir si des gens qui vous suivent mais que vous ne suivez pas (et dont les tweets, donc, n’apparaissent pas dans votre timeline puisque vous n’y êtes pas abonné) vous parlent ou vous citent. Et même sans s’abonner à leur compte, vous pouvez leur répondre.

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On y trouve aussi les « Messages Privés » (que personne à part vous ne peut voir, mais attention là aussi, vous n’avez droit qu’à 140 caractères par message ! et vous ne pouvez en envoyer qu’à ceux dont le « suivi » de compte est réciproque), et les « Retweets » qui indiquent les derniers tweets retweetés, ceux que vous avez retweetés, et vos propres tweets retweetés par d’autres.

Traditions

Il y a déjà des traditions, sur Twitter. Tous les vendredis, c’est « Follow Friday » ou « #FF » (bien que la variante française « Suivez Vendredi » ou #SV » tente laborieusement de s’imposer). C’est le jour où on indique à nos followers les comptes intéressants à follower.

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Il y a également le « #jeudiconfession » : tous les jeudis (donc) on peut confesser ce qu’on veut. Ca peut être drôle, ça peut être vrai, ça peut être émouvant…  En tout cas, en faisant une recherche avec ce hashtag, on peut tomber sur des perles.

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C’était donc une initiation non-exhaustive à Twitter. Le mieux pour vraiment appréhender ce merveilleux outil, c’est encore de l’essayer. Comme rien ne vaut l’expérience pour vraiment maîtriser le langage, je conseille aux nouveaux inscrits de suivre le plus de comptes possibles (des stars, des comptes de journaux ou de chaînes de télé, des blogueurs, des journalistes, des amis, etc…), d’observer, et de se lancer. Ce n’est vraiment pas compliqué et ça peut être à la foispassionnantinstructif au niveau de l’actualité, enrichissant quand des débats s’installent entre followers, et hilarant souvent. sociologiquement,

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Si vous êtes journaliste et que vous n’avez pas encore de compte, j’aurais presque envie de vous dire que c’est une faute professionnelle. Ca me semble ahurissant de nos jours de travailler sans cet outil de base qu’est devenu Twitter. La plupart des informations arrivent sur Twitter avant d’être reprises par l’AFP – et parfois bien avant : la mort de Mano Solo, par exemple, était sur Twitter… cinq heures avant la première dépêche AFP !! Bien entendu, comme toute information, il faut la vérifier – ça ne change rien. Mais ça me semble réellement indispensable à une pratique rigoureuse du journalisme aujourd’hui.

Certaines disent que Twitter est absolument inutile, d’autres ne peuvent plus s’en passer et live-tweeteraient leurs rêves s’ils le pouvaient. Les fondateurs, eux, pensent que Twitter va changer le monde (article très intéressant d’un utilisateur de Twitter « sans plus »). Si la formulation est un peu excessive, mon opinion est qu’ils ont sûrement raison. Un outil qui permet de diffuser une information où que l’on soit dans le monde à des millions de personnes en l’espace de quelques secondes est forcément révolutionnaire.

Bien sûr, il reste limité : il est censuré dans certains pays, il faut être équipé en matériel informatique ou en réseau téléphonique pour pouvoir y accéder, etc… Il n’empêche qu’il cartographie l’histoire d’une partie de l’humanité chaque seconde comme rien ne l’avait rendu possible auparavant.

La bibliothèque du Congrès américain ne s’y trompe d’ailleurs pas : elle a décidé d’archiver l’intégralité des archives de Twitter depuis sa création en 2006 par Jack Dorsey (entre autre). Du tout premier tweet de Jack à celui de Barack Obama annonçant sa victoire à l’élection présidentielle, ce sont des milliards de tweets qui vont être archivés. Il y aura également le premier tweet envoyé d’un sous-marin, le premier tweet envoyé de l’espace (à bord de l’ISS)… et bientôt un premier tweet envoyé de la Lune ou de Mars ?

Dans tous les cas, avec cette initiative, Twitter rentre bel et bien dans l’histoire, et chacun pourra y laisser sa trace. Et si ça ne vous intéresse pas de vous y inscrire, rien ne vous empêche d’aller voir ce qui s’y trame : Twitter est un espace public, vous y êtes la bienvenue !

@FlorencePorcel